Pérou : Le peuple Sechurano (ou peuple autochtone de Sechura)
Publié le 22 Septembre 2022
Département de Piura
Sechura est un village de pêcheurs ancestraux dont les racines historiques remontent à environ 7000 ans avec la présence originelle de l’Homme d’Illescas dans le massif du même nom lors de sa première implantation. C’est là que naît l’activité de pêche dans cette partie de la côte péruvienne. Depuis, Sechura devient la base du développement social des Sechuranos et le garde-manger des villes entourant leur territoire.
En dehors du massif d’Illescas, les endroits les plus reculés où des preuves de présence humaine ont été trouvées sont Reventazón à Chorillos, Avic le long de la plage de l’estuaire de Virrilá au nord de San Pedro et Muñiquilá.
Dans le cadre du processus historique du peuple Sechurano on note la présence des hommes de Chusis, un important groupe social préhispanique qui reposait sur une vaste plate-forme d’origine marine appelés Tablazo Lobitos dans l’actuel village de Chusis.
Situé à 4 km de Sechura, son apogée a lieu au début de la période intermédiaire (100 av JC/600 ap JC). C’était probablement un centre politico-religieux régional le plus important et le plus grand centre d’échange de produits du Bajo Piura ainsi que peuvent en témoigner les restes de lamas et d’entrepôts dans le centre urbain.
Vers 400 après JC, une grande nation ethnique se constitue avec sa propre culture, idéologie et langue-dialecte, le SEC.
Les Chusis et les Illescas sont harcelés par la présence expansionniste des Moches (VIe siècle), des Chimús (XIIe siècle), des Incas (fin du XVe siècle) attirés par leur ambition de conquérir la culture sechurana et ses organisations.
En 1528, lors du 2e voyage de conquête, Francisco Pizarro arrive à l’embouchure du rio Santa (nord de Chimbote) et constate que toute la région fait partie d’un empire opulent. Il s’arrête sur le retour à Sechura et profite du bon accueil reçu pour prendre possession des lieux au nom de la couronne de Castille.
Langue
La langue s’appellait Sek, elle semble éteinte. Elle faisait partie de la famille des langues sechura catacao, une famille de langues éteintes du Pérou (ISO 639) qui comprenait :
- Le sechura (sek)
- Le groupe Tallán dont
- Catacao
- Colán
Visite des érudits espagnols Jorge Juan et Antonio Ulloa en 1740 qui décrivent les us et coutumes de la région et se servent de la culture de Sechura comme parangon pour décrire les habits du Royaume de Quito et du Pérou (ci-dessous, des exemples traduits par moi-même)
"Sechura contient environ deux cents maisons de canne, et une église d'adobes très capable et décente : son voisinage est tout de familles indiennes qui atteignent le nombre de quatre cents, qui travaillent comme muletiers ou pêcheurs.
Les maisons de tous ces villages sont aussi simples que celles des Indiens. Les maisons de tous ces villages sont si simples et si peu artificielles que leurs murs ne sont constitués que de roseaux réguliers ou de roseaux fragiles cloués au sol ; et les toits sont plats ; car comme il ne pleut pas, on leur épargne la pluie des deux eaux.
……et le soleil, tout comme le vent, les pénètre facilement. Les Indiens qui y vivent utilisent une langue différente de celle commune aux autres peuples, tant à Quito que dans le reste du Pérou.
Ils ne diffèrent pas seulement dans l'aspect formel de la langue, mais aussi dans l'accent, car en plus des voix qui se brisent sur un ton comme une chanson triste, ils mangent la moitié des derniers mots, comme s'il leur manquait le souffle pour la conclure".
Description des Sechuranos
...Le costume de ces Indiennes se réduit à un Anaco, comme celui de Quito, sauf qu'il est si long, qu'il traîne assez sur la terre ; il est beaucoup plus large, et elles ne l'attachent pas à la taille ; mais sans manches ; pour marcher elles le suspendent un peu et le ramassent sous les bras.
Elles se couvrent la tête de tissus blancs en coton, brodés ou non.
Les Indiens s'habillent à la mode espagnole, et de même qu'ils portent tous des chaussures, les femmes, en revanche, n'en portent pas.
Ils sont par nature hautains, très rationnels, et leurs coutumes sont quelque peu différentes de celles de Quito......
L'intelligence de la langue castillane, qu'aucun d'entre eux n'ignore, contribue à les rendre plus capables, et ils l'utilisent avec promiscuité comme leur propre langue. Ils s'imposent en toute matière et donnent une réponse très régulière à ce qu'on leur propose... (1978 : 1897).
Sur l’activité commerciale de Sechura
"Cette ville de Sechura est la dernière de la juridiction de Piura de ce côté, et ses habitants non seulement ne donnent pas de mules à un passager de leur plein gré, mais défendent le passage de toute personne de quelque nature qu'elle soit ou cèdent le passage à toute personne sans distinction de caractère, mais munie d'un passeport écrit du corregidor ; cette mesure est prise afin d'empêcher l'introduction illicite du commerce ; car, comme il n'y a pas d'accès à l'eau potable, il n'est pas possible d'y accéder. La route qui va vers la ville, il n'y en a qu'une autre appelée Rodeo, d'autres mules chargées d'eau sont amenées de Sechura, de sorte qu'au milieu de la route, elles donnent de l'eau à ceux qui en ont besoin.
La façon dont ils les conduisent est au moyen de très grands calabazos ou tutumos pour quatre mules, une pour l'eau et une autre pour la litière.
Lorsqu'ils sont en selle, les cavaliers la portent dans de grandes sacoches faites à cet effet ; chacun des passagers, qu'il soit en litière ou à cheval, se munit lui-même de l'eau qu'il doit boire en route ; car non seulement il n'y a pas d'eau sur toute sa longueur, mais on ne voit que du sable, des dunes de sable, que le vent souffle, et parfois des pierres salées, sans branches, ou toute autre chose verte".
Fondation de la communauté paysanne San Martín de Sechura
Comunidad Campesina San Martín de Sechura, à Piura, autre communauté côtière emblématique, berceau du peuple Sechura, ni reconnue ni enregistrée dans la base de données du MINCU.
Les autochtones ont compris la nécessité de s’assurer la propriété d’un territoire fixe hors de la portée des espagnols.
En 1543, les caciques de Colan, Catacaos, Sechura et Olmos présentent au vice-roi du Pérou, Don Blasco Nuñez de Vela un ensemble de reçus avec lesquels ils avaient acheté le droit de leurs terres à l’ancien gouverneur Vaca de Castro. Les documents sont acceptés par le vice-roi qui a décrété que :
« Soutenus par les Indiens avec les franchises et les lois, ils sont protégés en fait et en droit dans la propriété et la possession de leurs terres……avec les mêmes franchises que les métis ou les colons. (Cruz 1982 : 95).
Malgré tout ceci, l’état péruvien nie encore que ses communautés paysannes ancestrales soient des peuples autochtones !
Notre communauté a une histoire riche en événements et en personnages qui tournent autour de la défense de ce qui est sa ressource la plus précieuse : ses terres communales. Certaines personnes trouvent ironique que nous disions que ces terres ont été achetées par nos ancêtres et ne sont donc pas un don du ciel. Ils oublient que l'empire inca a été conquis par les Espagnols et que, sur notre propre territoire, nous avons été traités comme des étrangers.
Et si nous passons en revue le titre de la Communauté des Indiens, qui date du 9 mai 1544, lorsque le vice-roi du Pérou était Don Blasco Núñez de Vela, représentant du roi espagnol Don Carlos V et que notre représentant était le cacique NARCISO CAPULLAN, il y est indiqué que vingt mille pesos ont été versés au Trésor royal, pour lesquels ils ont présenté mille cent quatre-vingt-quatre reçus qui l'ont accrédité, paiements effectués entre 1539 et 1543, c'est-à-dire en cinq ans de contributions.
En outre, trois cent mille pesos ont été payés en encomiendas et en tribut personnel, y compris les quintos, les mandas et le synode correspondant à la culture de leurs terres. En bref, il fallait payer trois cent vingt mille pesos pour la propriété de nos propres terres à perpétuité. D'autres communautés voisines ont suivi un processus similaire pour obtenir leurs titres, comme Santo Domingo de Olmos, San Juan Bautista de Catacaos et San Lucas de Colán.
Suite de cette traduction
Pérou : Une brève histoire de la communauté paysanne San Martin de Sechura - coco Magnanville
traduction caro d'un article de mai 2011 en relation avec l'article sur le peuple Sechurano Image d'une plage à Sechura. Image : Blog CC San Martín de Sechura A l'occasion du 467ème anniversaire de