En France, l'avenir de l'Europe est en jeu

Publié le 18 Avril 2022

Elections présidentielles françaises vues d'Argentine....

11 avril, 2022 par Tercer mundo

Les élections ont été remportées par le président Emmanuel Macron, mais ce n'est pas tout à fait suffisant pour lui et il doit maintenant passer à un second tour avec la représentante de l'extrême droite, Marine Le Pen.

Par Gonzalo Fiore Viani pour L'Encre

Dimanche a eu lieu l'une des élections les plus importantes de ces dernières années concernant l'avenir de l'Union européenne (UE). C'était le premier tour des douzièmes élections de la Cinquième République française, où non seulement Emmanuel Macron jouait sa permanence au pouvoir, mais aussi l'extrême droite était déterminée à montrer ses muscles - selon les sondages précédents - renforcés. Au final, l'actuel président arrive en tête avec 27,6 % et une différence de quatre points sur sa principale concurrente, la leader d'extrême droite Marine Le Pen du mouvement Rassemblement national, qui arrive à 23,4 %. De son côté, Jean-Luc Mélenchon, du parti de gauche France Insoumise, arrive en troisième position, avec plus de 20 points.

Dans un résultat similaire à celui de 2017, il est clair que la politique française a radicalement changé depuis les dernières élections. Les partis traditionnels, comme le socialisme ou les conservateurs, n'ont même pas atteint cinq points entre eux. La débâcle du Parti socialiste historique est particulièrement catastrophique : la maire de Paris, Anne Hidalgo, atteint à peine plus d'un point et demi.

Le second tour entre Macron et Le Pen aura lieu le 24 avril. Contrairement au second tour de 2017, où le président sortant avait battu sa rivale par plus de 30 points, la marge est aujourd'hui plus faible. Alors que la plupart des sondages donnent à Macron une avance de 55 % contre 45 % pour la représentante de l'extrême droite, il n'est pas encore clair si Le Pen est capable de capitaliser une grande partie du vote contre l'actuel président. La droitière ne fait plus peur à ses compatriotes. Ces derniers temps, elle a considérablement modéré son discours et ne s'est jamais sentie aussi proche de l'Élysée.

La grande nouveauté de cette élection est Mélenchon, qui gagne quelques points par rapport à sa dernière prestation présidentielle et arrive en troisième position (22 %), une place qui avait été occupée en 2017 par le gaulliste François Fillion. En cinquième position, avec 4,8 %, se trouve Valérie Pécresse, du parti conservateur de droite Les Républicains. L'écologiste Yannick Jadot a à peine atteint 4,6 %, alors qu'il avait oscillé autour de 15 % des voix dans la première partie de la campagne. Le candidat des communistes, Fabien Roussel, est arrivé en septième position avec 2,3 % des voix, tandis que Nicolas Dupont-Aignan, l'autre candidat d'extrême droite, était plus loin derrière avec un peu plus de 2 % des voix.  

     
Le panéliste de télévision et polémiste professionnel Eric Zemmour, qui fantasmait il y a encore quelques mois pour enlever la représentation du populisme d'extrême droite à Le Pen, un homme ouvertement xénophobe et raciste, est arrivé quatrième avec 7,1 % des voix. En principe, on peut affirmer sans risque de se tromper qu'un grand pourcentage, voire la totalité, de ces votes iront en masse à Le Pen. Bien sûr, cela ne suffira pas à battre Macron, qui pourra compter sur les voix des partis traditionnels affaiblis et probablement d'une partie importante de la gauche. Cependant, la question que l'on pourrait se poser est de savoir si un électeur de Mélenchon, mécontent du gouvernement, mais aussi d'un profond malaise et d'un désenchantement vis-à-vis de l'establishment, de l'UE et de la mondialisation, n'a pas plus de points communs avec un partisan de Le Pen qu'avec un partisan de Macron. Les différences sont grandes : Mélenchon et son mouvement n'ont rien à voir avec la xénophobie de droite ou des liens avec des personnes comme Donald Trump ou Viktor Orbán. C'est pourquoi le candidat de gauche, sans dire pour qui il voterait au second tour, a déjà déclaré à plusieurs reprises que ses partisans "ne doivent pas donner une seule voix à Le Pen".

La France est un cas paradigmatique - avec toutes ses particularités, qui la rendent éminemment française - dans le monde quant aux raisons de la montée de l'extrême droite. A priori, tous les éléments auraient pu être en place depuis longtemps pour que la tempête parfaite se produise en France, mais elle ne s'est pas encore produite. Charles de Gaulle a dit que l'amour des Français pour l'égalité était en contradiction avec leur goût pour les privilèges. Cela pourrait expliquer, dans une large mesure, la tension permanente dans laquelle vit le pays, où tout semble prêt à exploser à tout moment.

D'une part, l'élection d'hier a décrété la fin du système de partis traditionnel de la Cinquième République française. Il est de plus en plus clair que le binôme Macron-Le Pen est le principal concours de pouvoir du 21e siècle. D'autre part, il est clair que le mécontentement à l'égard des élites traditionnelles, de la mondialisation et de tout ce que représente le "macronisme" est grand, tant à droite qu'à gauche.

Après le retrait d'Angela Merkel de la chancellerie allemande et de son rôle de leader de l'Union européenne, le président français tente de se poser en héritier ou en successeur à la tête du bloc continental. Jusqu'à présent, il n'a pas réussi, car il doit d'abord résoudre les conflits internes et consolider sa position à l'intérieur du pays.

Les forces que l'on pourrait qualifier d'"antibérales", qu'elles soient de droite ou de gauche, ont remporté plus de 50 % des voix. En d'autres termes, plus de la moitié des Français et des Françaises ont voté pour une option opposée au système en vigueur. Quel que soit le résultat du scrutin, cela pourrait fournir un terrain supplémentaire pour l'émergence d'une alternative extrémiste dans les années à venir, qu'il s'agisse de Mélenchon, de Le Pen ou d'un autre leader qui interprète au mieux le mécontentement et le malaise. S'il existe de grandes différences entre les leaders politiques, et si toutes les forces de gauche soutiendront Macron au second tour, il n'y a pas tant de différences que cela entre leurs électeurs. Pour l'heure, s'il est une chose qui est claire, c'est que ce qui se passera dans deux semaines définira non seulement l'avenir à court terme de la France, mais aussi, dans une large mesure, celui de l'Europe dans son ensemble.

*Par Gonzalo Fiore Viani pour La tinta / Photo de couverture : Caroline Blumberg - EFE.

traduction caro d'un article paru sur La tinta le 11/04/2022

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Argentine, #France, #Elections, #PolitiqueS

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