Ukraine/Roumanie : Le peuple Hutsul
Publié le 9 Mars 2022
By M. Senkowski - NAC digital archives - http://audiovis.nac.gov.pl/haslo/102:310/, Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=24704352
Peuple autochtone montagnard, anciennement pastoral vivant dans la chaîne des Carpates ukrainiennes ainsi que dans les régions limitrophes. Le pays Hutsul, ou Hutsulschchyna a une longue succession de contacts avec différentes puissances étrangères qui y ont étendu leur domination. Cette région a par ailleurs attiré l’attention de voyageurs, d’écrivains, d’artistes, de chercheurs.
Ce n’est que vers les XVIIe-XVIIIe siècles qu’ils sont décrits comme d’authentiques bergers mus par leur amour des montagnes, pour la liberté et l’indépendance. Longtemps, leur société a été basée sur les activités montagnardes basées sur la transhumance, un mode de vie qui leur apportait la liberté et les protégea pendant plus longtemps que d’autres populations de la pression du servage.
By Mikhail Kapychka - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=87215581
Population
Ukraine : 24.400 personnes environ
Roumanie : 3390 personnes environ
Présence également en Pologne, Slovaquie et Hongrie.
Des immigrants Houtsoules de l’ouest se sont établis dans des sociétés en Grande-Bretagne, aux EU à Chicago, Philadelphie, Buffalo, Cleveland, au Canada à Toronto.
Ces chiffres ne représentent qu’une estimation car la population réelle est non déterminée et les chiffres non officiels (Roumanie, quelques milliers, Ukraine pas de recensement pertinent dans ce domaine depuis son indépendance), plusieurs milliers de Houtsoules ont migré vers le Canada et les EU selon les chercheurs).
Autodésignation : hutsul (dont il existe plusieurs orthographes : goutzoules, hutzules, huculs, huzule (wittlin 1939), hutzels, gutsuls, guzuis, utzul (cuisenier 2000)).
En Pologne : Hucut
En Roumanie : Hutuli
Certains se définissent comme Rusynŷ (Ruthènes en français) d’où une certaine confusion entre les deux termes qui englobent les Houtsoules vivant en Ruthénie.
Certains Houtsoules récusent le terme de houtsoules en Ukraine parce qu’il aurait une connotation péjorative.
Langue
Elle peut être considérée comme un dialecte de l’ukrainien (avec des influences du polonais et du roumain).
Cette langue est en voie de disparition car les écoles enseignent l’ukrainien. Plusieurs mouvements associatifs, ces dernières années œuvrent à sa sauvegarde et à sa promotion en Ukraine et en Pologne.
Parc national Hutsulschchyna By Zybikok - Own work, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=32859898
Histoire
Voyageurs houtsoules sur une lithographie de 1872. Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=938701
Des preuves archéologiques de l’existence humaine dans la région remontent à 10.000 ans.
- Certaines localités comme Kosiv ont été colonisées dès le Néolithique (6000 – 4000 av.JC) et les dénommés Kurhans des Carpates fouillés à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle dans les vallées fluviales autour de Kolomyia et Kosic révèlent des preuves distinctes de la culture dace et de la culture de Cherniakhiv.
- Les Croates slaves ont habité la région au 1er millénaire après JC.
- Avec la montée des Rus’ de Kiev, ils deviennent des vassaux du nouvel état.
- Depuis le IXe siècle, des bergers roumains de Valachie, des Moldaves ou des Hongrois du sud des Carpates amenaient les troupeaux de chèvres et de moutons presque au pied des Tatras.
- Ils se sont installés avec leurs familles et mélangés avec les populations slaves sur place créant leur propre identité.
- Leur présence en Bucovine et en Ruthénie est attestée dès la fin du XVe siècle. Des ethnologues roumains suggèrent qu’ils pourraient être les descendants des Gète-Daces slavisés après le VIIe siècle.
- Les ethnologues ukrainiens affirment qu’ils seraient au contraire les derniers témoins de la culture des tous premiers slaves.
- Il y a sur le terrain un inextricable mélange de toponymes slaves et roumains ainsi que dans le vocabulaire ayant trait à l’agriculture, l’architecture et l’ethnographie.
- Le peuplement de cette partie des Carpates initialement ruthène sur le versant nord et roumain sur le versant sud (Voïvodine de Galicie-Volhyme au nord et Marmatie au sud au XIIIe siècle) est mis à mal par l’invasion mongole et tatare de 1233.
- De nombreux établissements et monastères hutsules sont mentionnés dans des chartes et des documents municipaux et fonciers à partir du XVe siècle (Bereziv 1412, Pystyn 1416, Kosiv 1424, Luh 1439, Pechenizhyn 1443, Kuty 1449, Vyhnytsia 1450, Pniv 1454).
- La population augmente à mesure que de plus en plus de paysans fuient dans les montagnes pour échapper au servage.
- Le peuplement ne se reconstitue qu’au XVIIIe siècle.
- Entre ces deux dates, la plupart des villages de montagnes sont abandonnés, de nombreuses cartes anciennes notent le nom de « loca deserta », « terra sine incolis (terre inhabitée) ou encore « regnum arctorum » royaume des ours.
- XIVe siècle, règne de Casimir le Grand, le pays hutsul fait partie du royaume de Pologne.
- En Bucovine, les Ruthènes n’étaient pas encore attestés aux temps de la principauté de Moldavie mais ils seraient décomptés de plus en plus nombreux à partir de la connexion autrichienne de la Bucovine en 1775.
- Au milieu du XIXe siècle, il y avait plus de 100 villages hutsules et 10 villes appartenant à des nobles de la région. Une petite noblesse en effet est apparue à Bereziv.
- Le 7 janvier 1919, une force hutsul chasse la garnison hongroise de Yasinia. Une république Houtsoule est déclarée dans l’actuel oblast de Transcarpatie. Cette région est rattachée à la Tchécoslovaquie quelques mois plus tard. La république Houtsule dure jusqu’au 11 juin, quand les troupes roumaines occupent la région.
- 1919/1939 : Le territoire Hutsul fait de nouveau partie de la Pologne.
- Mars 1939 : l’histoire se répète et l’oblast de Transcarpatie proclame son indépendance, il est envahi et annexé par la Hongrie.
- Durant la seconde guerre mondiale, les habitants se battent farouchement contre les hongrois, les allemands en septembre 1944 contre les soviétiques qui annexent la région en mai 1945.
- Ils ne furent jamais soumis.
By Henryk Gąsiorowski (1878-1947) - NAC digital archives - http://audiovis.nac.gov.pl/haslo/102:310/, Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=24704329
By Mikhail Kapychka - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=87211107
Un peuple qui se distingue
Par L’auteur n’a pas pu être identifié automatiquement. Il est supposé qu'il s'agit de : Yakudza (étant donné la revendication de droit d’auteur). — La source n’a pas pu être reconnue automatiquement. « Travail personnel » supposé (étant donné la revendication de droit d’auteur)., Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=495530
Les Hutsules se distinguent des autres groupes ethniques des Carpates
En effet, ils se distinguent par leur tenue folklorique colorés, richement ornée, portée à présent que lors des occasions festives.
Pour les deux sexes, le vêtement se compose d’un manteau noir ou rouge foncé (serdak), d’un chemisier ou d’une chemise de lin avec des broderies multicolores ou des perles de verre, d’une courte veste sans manches en peau de mouton blanche (kozhushyna ou kyptar), souvent, elle est ornée d’applications en cuir brodées d’incrustations de ficelles et de miroirs.
Les hommes portent un chapeau à large bord (krysania) décoré de ficelles, de plumes colorées.
Ils ont un chapeau en peau de mouton en hiver. Leur pantalon est en lin étroit et ils ont une ceinture large (remin) ou étroite (cheres).
Les femmes portent une jupe enveloppante (zapaska ou horbotka), un bandeau (mamitka) ou un foulard coloré (khustka), des chaussures ou mocassins en cuir lacés au-dessus de la cheville.
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Art
Le lizhnyk carpatique
Il s’agit d’un artisanat tissé en laine de mouton avec des dessins constitués de poils laineux sur un ou deux côtés. Ils sont connus également sous le nom de couvertures houtsoules. Ces couvertures sont utilisées dans la vie quotidienne, comme couvre-lits, sur les bancs, en couverture d’hiver.
Les lizhnyks modernes sont bien différents des anciens modèles traditionnels. Autrefois, pour en fabriquer un large, il fallait coudre ensemble plusieurs petits lizhnyks, car les métiers étaient plus étroits qu’aujourd’hui.
Le métier à tisser moderne fait un mètre et peut servir 40 à 50 ans. Dans les années 1920, la fabrication change, un couple invente un projet auquel les fabriquants contemporains ont recours. Leur technique de tissage permet de fabriquer des lizhnyks colorés (les couleurs populaires à cette époque étaient le vert, le rouge, le cerise). La production en série de lizhnyks commence, l’art devient connu dans le monde entier.
Dans les années 1930 les lizhnyks sont présents dans les expos à l’étranger, en Amérique surtout et en Pologne.
A l’époque soviétique, ils sont tissés dans des décors complexes dans les combinats industriels. Les femmes peignaient des dessins et des ornements parmi lesquels étaient choisis 4 ou 5 meilleurs variantes.
Aujourd’hui, ce sont les lizhnyks au décor simple qui sont les plus populaires (tricolores à rayures transversales). La fabrication est plus facile et plus rapide, ils coutent moins cher et redeviennent donc à la mode.
Autres formes d’art
By Seweryn Obst (1857-1917) - W. Szuchiewicz. Huculszczyzna. T. I. Lwów 1902, Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=18440925
Ils sont réputés pour leurs sculptures artistiques sur bois, l’incrustation d’objets en bois avec des perles de bois, de laiton, d’argent, d’os, de nacre, de verres contrastés. Pour leurs céramiques, leurs bijoux, leurs ornements et outils faits à la main en laiton, en cuir, en os. Leurs textiles tissés à la main, leur tissage kilim, leurs broderies, leurs œufs de Pâques, leur architecture folklorique en bois distinctive.
Par Adolf Błaż — Bibliothèque nationale de Pologne, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=104679942
Les églises de Vorokhta, Kniazhdvir, Kryvorivnia, Yasinia, Zeleno, Verbovets sont de beaux exemples du style hutsul.
La ferme hutsule est également remarquable pour ses caractéristiques.
Une riche collection d’artisanat et d’art du peuple hutsul peut être admirée au musée d’ethnographie et d’artisanat de Lviv, au musée régional de Tchernivtsi, aux musées ethnographique d’Oujhorod, de Vienne, de Budapest, au musée d’art populaire houtsul de Kolomyia.
By Unknown author - NAC digital archives - http://audiovis.nac.gov.pl/obraz/198090:1/h:102/, Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=24704268
Œuvres littéraires
Elles représentent fort bien la culture et les traditions populaires houtsoules.
Quelques auteurs
Ivan Francko 1859/1916
Hnat Khotkavych 1877/1938
Olha Kobylianska 1863/1942 (elle est devenue une des romancières ukrainiennes les plus renommées de son époque même si la société a été souvent choquée par son approche qui dénotait, de la sexualité féminine et de la condition féminine en général.
La musique folklorique est bien distincte ainsi que la danse folklorique qui porte le nom de kolomyika. La chanson folklorique ukrainienne dont les troïsta muzyka sont des groupes de musiciens typiquement constitués d'un violon, d'un cymbalum et d'un tambour sont très populaires au-delà de la région hutsul.
By Mikhail Kapychka - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=87215528
La Trembita est un instrument de musique emblématique de la culture Hutsul. Ce cor composé principalement de bois de sapin, et un peu de bois de bouleau qui sert à raccorder les parties principales, sonne toujours lors des festivités hutsules , autrefois il était utilisé comme moyen de communication entre la montagne et la vallée. La guimbarde ou drymba est encore utilisée aujourd’hui par ce peuple, chose extrêmement rare.
image drymba
Sources : wikipedia, sites google.com Pologne d’autrefois, encyclopédie internet d’Ukraine, cultinera.wordpress.com,
La guimbarde chez les Hutsuls : investigation ethnomusicologique sur la drymba dans les Carpates ukrainiennes de Philippe Dallais, Stéphane Weber, Caroline Briner, Joël Liengme,
https://www.ethnographiques.org/2002/Dallais,et-al