Rencontre Bolsonaro-Castillo à l'ordre du jour d'une nocive route transfrontalière

Publié le 6 Février 2022

La route transfrontalière présente un risque pour les populations isolées et la biodiversité des parcs nationaux des deux pays. Image : Composition (Présidence du Pérou - Avener Prado)

La réunion entre les présidents du Pérou et du Brésil a mis à l'ordre du jour une route qui affecterait les peuples autochtones en situation d'isolement et de premier contact. L'impact environnemental est immense.

La rencontre entre Pedro Castillo et Jair Bolsonaro a une nouvelle fois mis à l'ordre du jour la construction d'une autoroute transfrontalière qui menace les moyens de subsistance des peuples isolés.

Initiative promue par le président brésilien, la route vise à relier Cruzeiro do Sol (au Brésil) à Pucallpa (au Pérou), un itinéraire qui traverse le parc national de la Sierra del Divisor et la réserve indigène Isconahua.

Comme cela a déjà été dénoncé, ce projet entraînerait la déforestation de centaines de kilomètres de forêt vierge, faciliterait l'incursion d'agents extérieurs se consacrant à des activités illicites et mettrait en danger la vie des populations en situation d'isolement et de premier contact.

Selon Silvana Baldovino, directrice du programme "Biodiversité et peuples indigènes" de la Société péruvienne pour le droit de l'environnement (SPDA), la rencontre entre les deux dirigeants soulève un certain nombre de préoccupations.

Comme elle l'a souligné, Castillo et Bolsonaro sont d'accord pour ignorer l'importance des droits des peuples indigènes et ont montré un intérêt à minimiser l'importance des questions environnementales.

La route à l'ordre du jour

Le 3 février, les présidents des deux pays se sont rencontrés à Porto Velho, dans l'État brésilien du Rondônia, pour aborder, entre autres, les questions de commerce, de santé et de connexion.

À l'issue de la réunion, une déclaration présidentielle conjointe a été signée, réaffirmant la décision de construire une "alliance stratégique entre le Brésil et le Pérou".

Parmi les 36 points mentionnés, le huitième point indique l'intérêt de promouvoir la connexion terrestre entre Cruzeiro Do Soul, dans l'État d'Acre, et Pucallpa, dans l'Ucayali. 

La connexion à laquelle il est fait allusion fait référence à l'autoroute transfrontalière (extension de l'autoroute BR-364), une route proposée par Jair Bolsonaro et des parlementaires brésiliens de droite qui, depuis 2020, fait l'objet de nombreuses questions.

Un passé défavorable

En juin 2021, l'ancien président Francisco Sagasti a observé le projet de loi 6486/2020-CR, qui encourageait la construction de cette route Pucallpa-Cruzeiro Do Sul, sous l'impulsion de l'intégration multimodale entre le Pérou et le Brésil.

La décision du gouvernement fait suite à une plainte de l'Organisation régionale Aidesep Ucayali (ORAU), qui mettait en garde contre les impacts de ce projet approuvé par le Congrès, qui n'avait pas fait l'objet d'une consultation préalable.

Le Bureau du Médiateur et l'association civile Derecho, Ambiente y Recursos Naturales (DAR) se sont joints au rejet. Le projet a également reçu un avis défavorable du ministère de l'Environnement (Minam).

"C'était une mesure nécessaire face à un projet qui était trois fois non durable : au niveau environnemental, socialement et même économiquement", a déclaré Vanesa Cueto, vice-présidente de la DAR à l'époque.

Danger imminent

Sous le prétexte de "promouvoir le développement", l'extension de la route traverserait, du côté péruvien, le parc national de la Sierra del Divisor et la réserve indigène Isconahua.

Avec des zones qui se chevauchent, les deux catégories (parc national et réserve indigène) conservent une immense biodiversité et font partie du territoire habité par des peuples en situation d'isolement et de premier contact.

Isconahua connaît déjà des problèmes d'exploitation forestière illégale, de cultures illicites et de voies de trafic de drogue transfrontalières, ce qui en fait la réserve indigène la plus envahie du pays, selon une étude récente.

Dans ce contexte, une route faciliterait l'expansion des entreprises illicites, mettrait gravement en danger les moyens de subsistance des populations locales et modifierait l'écosystème de leurs territoires.

Plus d'avertissements

Comme le rappelle une série de reportages de Mongabay, si cette route accroît la violence des activités illicites au Pérou, au Brésil, elle aurait un impact dévastateur sur la biodiversité du parc national de Serra do Divisor.

Les questions se multiplient avec le précédent de l'autoroute interocéanique, une route achevée en 2010 qui, loin d'être un développement, a entraîné la perte de plus de 170 000 hectares de forêt primaire.

Face à la destruction prévisible du territoire amazonien, les dirigeants indigènes et les écologistes ont rejeté l'expansion routière promue par Bolsonaro et des groupes similaires.


Le gouvernement brésilien prévoit de défricher 130 kilomètres de forêt vierge pour construire une nouvelle autoroute transocéanique. Graphique : The Guardian

Maintenant, après la dernière rencontre avec Bolsonaro, il reste au gouvernement péruvien actuel à affirmer clairement sa position sur cette route.

traduction caro d'un article paru sur Servindi.org le 05/02/2022

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