Chili : Le peuple Chono
Publié le 29 Juillet 2021
Peuple autochtone qui habitait les îles et les canaux de l’archipel de Chiloé et de la péninsule de Taitao à l’extrême sud du Chili.
Les Chonos occupaient les îles de la Patagonie occidentale. Cette région comprend les archipels de Chiloé et "Chono" jusqu'à la péninsule de Taitao et le golfe de Peñas. Ces archipels ont été formés à partir des sommets de la chaîne de montagnes côtières submergée et constituent un véritable labyrinthe d'îles, de canaux et de fjords. Les 1 047 îles sont couvertes d'une forêt tropicale dense qui rend les déplacements terrestres difficiles, et il y a peu de plages pour les débarquements en bateau.
Ils étaient des navigateurs experts qui partaient chasser le lion de mer et les oiseaux dans leurs dalcas.
péninsule de taitao image fb
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Histoire
Il y a peu de données sur les groupes qui étaient regroupés sous la dénomination « chonos », selon la définition inventée par John Cooper en 1917 et suivie par les auteurs ultérieurs.
Les témoignages des explorateurs et des prêtres de l’époque coloniale parlent de différentes nations peuplant le territoire de canaux sans aucune certitude sur le nombre ou les caractéristiques distinctives de ces groupes.
Sur l’île de Navarino les vestiges d’établissements humains trouvés dans la zone des canaux de Patagonie ont 7500 ans.
Sur l’île de Chiloé, au nord de l’île, ces vestiges ont 6100 ans.
Au milieu du XVIe siècle, la région nord de Chiloé est habitée par un peuple d’horticulteurs/pêcheurs de langue mapuche connu sous le nom de Huilliche ou Cunco. Il serait arrivé dans la région depuis le continent quelques siècles plus tôt.
Au sud des Huilliches, sur la côte sud-est de Chiloé se trouvaient les Payos, qui étaient peut-être des canoéistes acculturés par les premiers et en partie déplacés vers le sud.
Les îles Guaitecas et l’archipel de Chonos entre 44 et 18 ° sud étaient habités par des groupes connus sous le nom de Chonos à l’époque coloniale, qui se déplaçaient continuellement sur le territoire et vivaient de la chasse et de la cueillette, pratiquant également la culture naissante des pommes de terre.
Dans la partie sud de cette zone, au-delà de la péninsule de Taitao, il y avait d’autres groupes connus sous différents noms par les chroniqueurs qui pour Cooper peuvent être considérés comme des Chonos étant donné l’incertitude de leurs caractéristiques et la similitude de leur mode de vie.
Les conquérants espagnols commencent à explorer la zone du canal dans les années 1550.
La première expédition qui entre en contact avec des indigènes dans la région est celle de Francisco de Ulloa en 1553 lors de son voyage vers le détroit de Magellan. Ils arriment dans un archipel appelé Chonos et au sud de cet endroit ils affrontent des indigènes.
En 1557 l’expédition espagnole du commandant Juan Ladrillero se rendant dans le détroit de Magellan, fait dans son rapport de voyage des descriptions d’indigènes des canaux identifiés comme Huilis.
Dans la seconde moitié du XVIe siècle a lieu la conquête de Chiloé, les conquérants reçoivent des terres et des indigènes leur sont confiés dont des indigènes guaitecos.
La première mention comme Chonos remonte à 1609 lorsque le prêtre jésuite Juan Bautista Ferrufino se réfère à l’archipel des Chonos et raconte qu’il a fait un catéchisme dans la langue de ce peuple indigène qui selon lui, était très différente et plus compliquée que le mapudungun des Huilliches.
En 1612 les jésuites résidant à Castro font une expédition aux îles Guaitecas car un chef Chono les invite à les visiter et à prêcher parmi son peuple. Ils y construiront des églises et formeront des procureurs indigènes pour maintenir le culte le reste du temps.
Après une période de tentative de rapprochement espagnol avec les Chonos, ce sont eux qui commencent à venir à Chiloé à la recherche de femmes et d’objets en métal et autres à l’occasion de raids. En représailles les espagnols font de même dans les îles Chonos, ils reviennent avec des prisonniers qui seront utilisés comme esclaves et qui ne vivront pas longtemps à cause du changement de régime.
En 1710 un groupe de 166 Chonos de tous âges apparaît au fort San Miguel de Calbuco voulant la paix et vivre parmi les espagnols. Ils sont acceptés, restent et adoptent le christianisme.
Dans les années suivantes, les familles continuent d’arriver dans la région atteignant 600 personnes (c’est-à-dire la quasi-totalité de la population). Ils reçurent l’île de Guar et sont dispensés de servir les espagnols.
A Guar ils sont constamment harcelés par les coupeurs de mélèzes allant extraire le bois à Melipulli (aujourd’hui Puerto Montt).
Tous sauf 4 familles se dispersent dans toute la mer intérieure de Chiloé et reprennent le nomadisme. Les autres s’installent dans des points aussi disparates que Calbuco, Chaulinec, la sortie du canal de Chacao, près de l’île de Guato.
Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle ils vivent de manière semi-nomade même si malgré tout l’agriculture prend une plus grande importance.
Eux et les autres canoéistes indigènes de Caillín étaient les seuls à maîtriser la chasse à la baleine et à troquer l’huile de baleine conte de la farine et d’autres produits.
Les chroniques de l’époque mentionnent une diminution du nombre de Chonos dus à la pénurie de femmes attribuée à la pratique de la plongée réduisant leur espérance de vie.
Vers la fin du XVIIIe siècle, le peuple Chono est considéré comme disparu, s’étant mêlé à d’autres canoéistes de Caillín et la plupart des hommes ayant épousé des femmes Huilliche. Les descendants adopteront le mode de vie commun de la population hispano-huilliche de Chiloé.
Au cours du XIXe siècle, il y a des rapports sporadiques de canoéistes indigènes considérés comme Chonos.
Au XXe siècle, un homme Kawésqar affirme avoir eu des rencontres avec eux.
En 2006 une expédition a été organisée, qui s’est rendue dans l’intérieur inexploré de la péninsule de Taitao à la recherche de vestiges archéologiques et de Chonos ayant pu survivre sans contact avec le monde extérieur au cours des deux derniers siècles.
Des études génétiques menées à Chiloé indiquent que la population de l’île de Laitec présente des marqueurs génétiques différents de ceux d’autres populations plus septentrionales de Chiloé et similaires à ceux des peuples fuégiens ce qui pourrait être un indicateur d’ascendance chono.
Langue
La langue chono dont il reste peu de traces semble avoir été liée au kawésqar dont il est postulé qu’elle serait un dialecte.
Mode de vie
Les dalcas (embarcations)
Les dalcas étaient fondamentales dans la vie des Chonos. Elles étaient composées de 3 planches pliées, une au centre et 2 sur les côtés pour former un canot long et étroit. Les planches étaient fixées avec des cordes torsadées fabriquées à partie d’écorces broyées d’un bambou appelé culeu. Plus tard elles seront calfeutrées avec des feuilles de fiaca ou mépoa en superposant de l’écorce de maque. Une ancre était constituée de pierres et de bois.
Quand le vent était favorable, ils hissaient une voile.
Ce bateau suscitait l’admiration des chroniqueurs.
Reconstruction d'une dalca au musée de Dalcahue, Chiloé, De Lin linao - Trabajo propio, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=1545463
Division sexuée du travail
Les hommes s’employaient à la pêche et à la chasse au lion de mer. Cet animal étai apprécié pour sa chair mais aussi pour son huile et sa graisse dont ils obtenaient une boisson.
Les hommes devaient aussi monter la hutte sur le continent, les plus jeunes gommes chassaient les oiseaux la nuit en les éblouissant dans leurs nids et les faisant tomber dans les dalcas où ils les abattaient avec un bâton.
Les femmes s’occupaient du ramassage de coquillages de roche et des grands fonds par la plongée. Elles s’entraînaient à cette activité dès leur plus jeune âge ver s3/4 ans. Elles portaient dans leur bouche ou autour de leur cou un panier où elles mettaient ce qu’elles ramassaient avant de remonter à la surface. Elles collectaient des algues, des champignons, des œufs, du bois de chauffage pour le foyer.
Les Chonos avaient des chiens pour les aider à se nourrir, ces chiens étaient entraînés à plonger dans la mer et à rapporter des poissons déposés dans des filets tenus par deux femmes. Les chiens Chonos étaient dressés pour aider à la chasse et à la pêche, et leur fourrure hirsute fournissait des fibres qui étaient combinées avec de l'écorce et d'autres fibres végétales et tissées en vêtements et en tapis.
Les Chonos ne pratiquaient pas l'agriculture, à l'exception de la culture de pommes de terre et d'autres légumes dans de petites parcelles de jardin, à l'époque préhispanique. Dans les années qui ont suivi la colonie, les Chono ont cultivé un peu de maïs et d'orge et ont élevé quelques moutons et chèvres.
Quand une baleine s’échouait, sa viande, son cuir et ses fanons étaient utilisés.
Outils et armes
Ils fabriquaient des lances, des massues, des poignards en os, des haches et des couteaux en pierre, des crochets en bois et des filets avec la fibre d’un arbre nommé quantu. De cet arbre ils obtenaient des couvertures et de la vannerie. Ils utilisaient un arc et des flèches occasionnellement.
En tant que nomades de la mer, les Chonos se déplaçaient d'île en île sans base d'opérations. Ils passaient la plupart de leur vie à bord de leurs dalcas, déplaçant toute la famille là où les ressources étaient les plus abondantes et emportant tous leurs biens avec eux. Les navires étaient démantelés et ramenés à terre lorsque cela était nécessaire.
Ils ont formé des habitations en forme de cône aplati dans leurs camps temporaires. Ces structures de forme elliptique étaient constituées d'une série de longues branches droites, enfoncées dans le sol et penchées vers l'intérieur.
Les branches étaient attachées ensemble à l'apex avec des fibres végétales. Les Chonos recouvraient le sol de leurs habitations de branches sèches pour les protéger du froid, tandis que la structure était recouverte de feuilles, de peaux et d'écorces pour les protéger du vent. Comme les matériaux de couverture n'étaient pas faciles à obtenir, les gens les emportaient avec eux dans la dalca lorsqu'ils se déplaçaient.
Les huttes avaient une seule petite entrée et leur taille dépendait du nombre de personnes qu'elles abritaient. La cheminée était au milieu pour fournir de la chaleur pour se chauffer et pour cuisiner. Les huttes n'avaient pas de fumoir, ce qui les rendait inconfortables à vivre. Lorsqu'un groupe de Chonos quittait un camp, il laissait la charpente en place pour les futurs occupants.
Ils se consacraient à l’élevage de « chien laineux »probablement des guanacos dont la fourrure était utilisée pour fabriquer des vêtements chonos caractéristiques.
Les viandes, les fruits de mer étaient conservés en les fumant pour qu’ils puissent être consommés en hiver.
Ils utilisaient des peintures corporelles pour le visage : rouge, blanc et noir.
Ils n’enterraient pas les morts mais les déposaient dans des grottes ou sur des plateformes rocheuses.
Les vêtements étaient rares, la plupart du temps ils étaient nus avec simplement un pagne en écorces ou en algues. Les jours les plus froids, ils se protégeaient sous des tentes en cuir de lion de mer.
Les sites archéologiques Chonos
A la fin du siècle dernier, le navigateur chilien Enrique Simpson décrit différents types de sites archéologiques qu'il a visités lors de son exploration du territoire Chono sur la Corbeta Chacabuco :
" Cet après-midi, nous avons tous campé sur un plateau de coquillages sur la côte sud de l'île de Traiguén ou Acuau, à l'intérieur d'un étroit canal qui va d'est en ouest, et que les anciens Chonos appelaient les Guaihuenes, ce qui dans leur langue signifie Nation du Sud. Dans tout ce voisinage se trouvent ces bancs ajoutés à la côte, et à mon avis, ils sont artificiels ; car ils sont isolés comme des taupes et sont composés de coquilles de toutes sortes, toutes pêle-mêle. Leur situation est toujours dans des endroits propices au campement des Indiens aquatiques, et pour cette raison je crois qu'ils sont les coquilles des mollusques qu'ils mangeaient. Ceux qui pensent qu'il s'agit de cimetières ne manquent pas non plus. Celui dont je m'occupe est presque carré, d'une centaine de mètres de côté avec une élévation d'environ quatre mètres au-dessus de la marée haute, et sa surface est très régulière et couverte actuellement d'herbe et de quelques buissons de Calafate et de Michai" pp:71.
"Cette nuit, après une bogada longue et inconfortable à cause de la grêle qui nous tombait dessus, et du froid qui en résultait, nous avons campé dans le petit canal des Guaiguenes, au SO de l'île de Traiguen, sur le même plateau de coquillages de l'année précédente.
"Ce plateau, je l'ai décrit alors, en donnant mon opinion qu'il n'était autre chose qu'un cimetière chono ; avec cette nouvelle visite, j'en ai acquis la certitude, car nous avons trouvé quelques ossements humains, très détruits, faisant saillie sur le fronton, usés par les eaux. Si j'avais emporté des outils, j'aurais effectué des fouilles, mais malheureusement, ils ont été oubliés à bord. Ce fait est très intéressant, car il y avait une idée parmi les chasseurs de loups et les quelques personnes intelligentes qui ont visité ces régions, que les anciens Chonos n'enterraient leurs morts que dans des grottes, conditionnées comme des momies et tapissées d'écorce de cyprès ; mais il est certain que cela dépendait des circonstances.
"Dans ce canal, où les coquillages abondent et sont par ailleurs parfaitement défendus contre les vents redoutables et la mer agitée, les Indiens devaient être comparativement nombreux, comme l'attestent ce banc et d'autres bancs voisins de coquillages mélangés ; celui que je traite n'est pas inférieur à 20.000 mètres cubes." pp:1 19.
"...mon voyage par le canal de Lagreze et retour par ceux de Tuamapu et Amortajado.
"Dans ce dernier canal, il y a une crique que j'ai appelée Momies, parce qu'elle contient dans un ravin, à environ deux mètres de l'eau, quelques petites grottes où l'on a trouvé des restes de la race indienne Chonos, dont on ne voit plus que quelques fragments d'ossements, les os parfaits ayant été extraits, il y a des années, par les loberos et vendus pour les Musées" pp:114. (source de cette traduction)
La fin d’une culture
C’était un peuple qui avait connu une grande réussite d’adaptation dans des environnements compliqués et rigoureux pour la survie humaine. Il existe malheureusement peu de vestiges de leur culture.
Sources : wikipedia, museo chileno de arte precolombino, skorpios. Cl, etnias del mundo.com
IMAGES sur le site Memoria chilena