Brésil : Des enregistrements de garimpeiros font état d'une "faction armée" et d'un risque de massacre sur la Terre Indigène Yanomami
Publié le 11 Mai 2021
Lundi 10 mai 2021
Amazonie
La fusillade de lundi matin fait 5 blessés et les garimpeiros menacent de riposter. Hutukara demande aux autorités d'agir "de toute urgence pour mettre fin à la spirale de la violence contre la communauté Yanomami de Palimiu".
Une série d'audios transmise le lundi 10/5 dans les groupes WhatsApp de garimpeiros, qui opèrent à l'intérieur de la terre indigène Yanomami, indique l'escalade de la tension entre les envahisseurs et les communautés indigènes. Les conversations font état du mouvement d'une "faction" lourdement armée de "fusils et de mitrailleuses" sur le rio Uraricoera, la région la plus envahie par les garimpeiros de toute la Terre indigène située entre les États de Roraima et d'Amazonas.
L'Association Yanomami Hutukara a dénoncé une fusillade qui s'est produite dans la matinée du lundi 10/5, lorsque sept bateaux de garimpeiros ont accosté dans la communauté de Palimiú et ont commencé une attaque contre le peuple indigène. L'action a fait au moins cinq blessés dans la communauté. Quatre garimpeiros et une victime indigène ont été abattus. Les audios du groupe de mineurs font cependant état d'un grand nombre de victimes (lire la transcription ci-dessous) qui n'ont heureusement pas été confirmées. "L'information de huit morts ne tient pas la route, je viens de parler par radio avec les dirigeants de Palimiu et leurs proches sont protégés", rapporte Dario Kopenawa Yanomami, directeur de la Hutukara Associação Yanomami.
Selon Kopenawa, il y a eu une fusillade ouverte "pendant environ une demi-heure". Les bateaux des garimpeiros sont partis en amont de la rivière et ont menacé de revenir pour se venger, dit le leader indigène. Dans une lettre adressée à l'armée, à la police fédérale, à la Funai et au ministère public fédéral, la Hutukara demande à ces organismes d'agir "de toute urgence pour empêcher la poursuite de la spirale de la violence locale et garantir la sécurité de la communauté yanomami de Palimiu".
Les communautés Yanomami de Palimiu, dans le cours moyen du rio Uraricoera, sont situées près des structures de la Mission construites en 1966 par l'équipe de la Mission évangélique de l'Amazonie (MEVA). Actuellement, la région abrite 937 personnes, réparties dans une quinzaine de communautés.
Le rio Uraricuera est l'un des plus touchés par l'exploitation aurifère illégale dans la TI, et ce n'est pas d'aujourd'hui. Entre 1987 et 1989, on estime que plus de 2 000 radeaux de garimpeiros ont emprunté cette rivière. La première invasion minière à grande échelle s'est produite entre la fin des années 1980 et les années 1990, affectant énormément la vie des Yanomami et des Ye'kwana qui y vivaient. Avec la reprise des invasions, surtout après 2019, le fleuve a été consolidé comme l'une des principales voies d'entrée et d'approvisionnement des mines illégales de la TIY. Aujourd'hui, les communautés indigènes sont entourées de garimpeiros.
La logistique de l'exploitation minière sur le rio Uraricoera dépend de plus en plus de l'accès au fleuve. C'est pourquoi, ces dernières années, les Yanomami de Palimiu ont vu leurs ports envahis illégalement par des milliers de garimpeiros, qui circulent librement sur le cours du fleuve dans le but d'apporter des intrants et du carburant aux zones d'exploitation illégale en amont.
Histoire récente des conflits
Il y a dix jours, le 30 avril 2021, la Hutukara a envoyé une lettre à la police fédérale, à la Funai et au MPF, informant ces institutions d'un conflit armé survenu entre les Yanomami et les garimpeiros dans la communauté de Palimiu. Dans cette lettre, les indigènes demandent le soutien des organismes publics afin de prendre des mesures pour assurer leur sécurité. Dans cette lettre, Hutukara met en garde contre la possibilité d'une escalade de la violence, avec de graves conséquences.
Deux mois plus tôt, le 1er mars 2021, Hutukara avait déjà envoyé une autre lettre à la police fédérale pour l'informer d'un conflit survenu dans la communauté de Helepe, également sur les rives du rio Uraricoera, au cours duquel un groupe de huit garimpeiros s'était approché de la communauté et avait tiré sur un indigène, déclenchant un conflit qui s'est soldé par la mort d'un mineur et un indigène blessé. À l'époque, les garimpeiros en retraite menaçaient déjà de se venger.
Lisez ci-dessous la transcription des audios transmis le lundi 10 mai à un groupe de mineurs à l'intérieur de la terre indigène Yanomami :
Audio 1
"C'est vrai, mes amis. Oui, mes amis. Quelqu'un peut me dire ce qui se passe sur l'Uraricoera [rivière] ?
Audio 2
"Mon garçon, ça va être dur ici. Il y a un canoë qui descend ici de la faction. Plus de vingt hommes armés, là pour l'Americano [surnom de la mission évangélique sur la terre indigène des Yanomami], où il a pris son essence. Il y a les moteurs de 75 [HP] ici. Juste à côté du flotteur. Ils descendent maintenant, tous avec des mitrailleuses, des fusils, la totale. Ils vont descendre à l'Americano là-bas. Ça va être moche. S'ils tuent 10, 15 Indiens, ça va devenir moche ici. Et nous devons rester énervés par ici. Ils descendent, ils sont juste là, près de l'endroit où était la cabane de Roseli, ici à Piuí. Dans un petit moment, ils vont descendre.
Audio 3
"Ils sont arrivés à l'Americano et ont commencé à tirer. Des gens ont été abattus partout. Deux personnes ont déjà été abattues ici. Et là, on dit qu'il y a beaucoup d'Indiens abattus [...]".
Audio 4
"Aujourd'hui, deux canots sont descendus, deux canots avec des hommes armés. Ils sont arrivés dans l'un d'eux et ont raconté l'histoire en y mettant le feu. Des gens ont été abattus partout. On dit que les affaires sont mauvaises là-bas. Il y a beaucoup de tirs là-bas.
Audio 5
"Mais je devais y aller demain. Je suis prêt... Je suis prêt à descendre, en attendant le canoë. Mais comment allez-vous descendre maintenant ? Un paquet d'hommes arrive, tous armés là, [...] pour finir de tuer les Indiens. Alors qui va tomber ? Personne ne descend plus.
Audio 6
"Il y a plus de 500 Indiens. Tous cagoulés, tous armés. C'est une guerre. Ça va être une fusillade monstre."
Audio 7
"A l'instant, un canoë s'est arrêté ici. Nous allons penser qu'il appartient aux Indiens. J'étais déjà en train de courir... Ça va devenir moche.
Audio 8
"Est-ce que quelqu'un a des informations sur les personnes qui sont descendues pour affronter les Indiens et les Indiens là-bas, ce qui s'est passé ?
Audio 9
"[...] Il est plus certain que demain ou même aujourd'hui, l'aviaozão y tournera."
Audio 10
"C'était tous les gars de la Faction. L'un d'entre eux est mort. Il y a une information ici qui dit que l'un des membres de la faction est mort. Deux d'entre eux ont été abattus. Il semble que huit Indiens soient morts. Et il y a plus de dix blessés.
Audio 11
"Je parle à deux garçons qui étaient dans le canoë là-bas. Il me demande de faire passer le mot pour que le canoë n'aille pas là-bas aujourd'hui. Parce que on ne sait pas ce que les Indiens voudront faire. Si quelqu'un va là-haut avec un chargement, qu'il le fasse savoir à Estreitinho, compris ? A Korekorema. Ne laissez pas les canoéistes y aller. Personne ne devrait faire confiance à ces Indiens là-bas. Deux garçons du canoë, [un gars] du canoë. Ils m'ont envoyé un message me demandant de vous avertir à ce sujet.
traduction carolita d'un article paru sur le site de l'ISA le 10 mai 2021
Áudios de garimpeiros apontam para "facção armada" e risco de massacre na Terra Yanomami
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