Vieja María vas a morir

Publié le 26 Août 2020

Vieille María tu vas mourir

 

Vieille María
 
Vieille María, tu vas mourir.
 
Je veux te parler sérieusement
 
ta vie était un chapelet complet d'agonies
 
il n'y avait pas d'homme aimé, pas de santé, pas d'argent
 
juste la faim à partager,
 
je veux parler de ton espoir,
 
des trois différents espoirs
 
que ta fille a fabriqué sans savoir comment.


Prends cette main qui semble celle d'un enfant
 
dans la tienne polie avec le savon jaune
 
frotte tes cors durs et tes articulations pures
 
dans la douce honte de ma main de médecin.


 Écoute, grand-mère prolétaire
 
crois en l'homme qui vient
 
crois en l'avenir que tu ne verras jamais.
 

Ne prie pas le dieu inclément
 
qu'une vie entière a menti à ton espoir
 
ne demande pas de pitié à la mort,
 
pour regarder pousser tes caresses brunes
 
les cieux sont sourds et en toi les règles obscures,
 
tu auras avant tout une vengeance rouge
 
je le jure par la dimension exacte de mes idéaux
 
tes petits-enfants, vivront l'aurore
 
meurs en paix, vieille combattante.


Tu vas mourir, vieille María ;
 
trente projets de linceuls
 
diront au revoir avec leur regard
 
le jour de ton départ.


 
Tu vas mourir, vieille María,
 
les murs de la salle seront silencieux
 
quand la mort rencontre l'asthme
 
et copule leur amour dans ta gorge.

 

Ces trois caresses construites en bronze
 
la seule lumière qui apaise ta nuit
 
ces trois petits-enfants habillés de faim
 
les nœuds de tes vieux doigts leur manqueront
 
où ils trouvaient toujours un sourire.


 
C'était ça, la vieille María.
 
Ta vie était un chapelet de maigres agonies
 
il n'y avait pas d'homme aimé, de santé, de joie,
 
juste la faim à partager.


 
Ta vie était triste, vieille María.
 
Quand l'annonce du repos éternel
 
nuance la douleur de tes pupilles
 
quand tes mains qui passent sans cesse la serpillière
 
absorbent la dernière caresse,
 
pense à eux... et pleure,
 
pauvre vieille María.


 
Non, ne fais pas ça.
 
Ne prie pas le dieu indolent
 
qu'une vie entière a menti à ton espoir
 
ou ne demande pas grâce à la mort,
 
ta vie était horriblement habillée de faim
 
elle finit vêtue de faim.


 Mais je veux t'annoncer
 
dans la voix basse et virile des espérances
 
le plus rouge et le plus viril des espoirs
 
je le jure par l'exacte
 
dimension de mes idéaux.


 
Prends cette main qui ressemble à celle d'un enfant
 
entre les tiennes polies par le savon jaune
 
frottes les cors durs et les articulations pures
 
dans la douce honte de mes mains de médecin.


 
Repose en paix, vieille María,
 
Repose en paix, vielle combattante,
 
tes petits-enfants vivront tous l'aurore,
 
Je le jure.

Nicolás Guillén traduction carolita

 

Source paroles originales

Rédigé par caroleone

Publié dans #Cuba, #La poésie que j'aime, #Au coeur du Che

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