Brésil : Le peuple Mebêngôkre (Kayapó)

Publié le 6 Juillet 2020

Par Ana_Cotta Flickr, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=26246739

Peuple autochtone du Brésil vivant dans les états du Pará et du Mato Grosso. Ils vivent dans une série de villages disséminés le long du cours supérieur des rios Iriri, Bacajá, Fresco et d’autres affluents du puissant rio Xingu sur un territoire du secteur central du Brésil (Brésil central) presque aussi grand que l’Autriche mais presque totalement recouvert par la forêt équatoriale à l’exception de la partie orientale où se trouvent des savanes et des zones fermées. Leur cosmologie, leur vie rituelle et leur organisation sociale très riches et complexes tout comme les relations avec la société nationale et les écologistes du monde entier sont intenses et ambivalentes.

Population : 11.675 personnes (2014)

Autodésignation : mebêngôkre = hommes du lieu de l’eau.

Le nom kayapó

Por Uyvsdi - Obra do próprio, Domínio público, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=10423249

Ce nom est utilisé les premières fois au début du XIXe siècle, ce n’est pas leur autodésignation mais un terme venant des peuples voisins pour les nommer et qui veut dire « ceux qui ressemblent à des singes » (probablement en raison d’un rituel à travers lequel les hommes portent des masques de singes et exécutent de courtes danses).

Langue : kayapó, tronc linguistique jê, il existe différents dialectes provenant de fissions à l’origine des groupes. Les Mebêngôkre pour qui l’oratoire est une pratique sociale valorisée se définissent comme « ceux qui parlent bien » (kaben mei) par opposition à tous les groupes qui ne parlent pas leur langue.

Localisation et terres indigènes

Ils vivent dans la plaine centrale du Brésil à une altitude de 300/400 mètre, dans une région de vallées, de grands fleuves alimentés par de nombreux petits ruisseaux et canaux. Il y a deux saisons, la saison sèche (hiver) de mai à octobre et la saison des pluies (été) de novembre à avril.

  • T.I Badjônkore – 221.981 hectares, 230 personnes, réserve homologuée dans l’état du Pará. Villes : Cumaru do Norte, São Félix do Xingu.
  • T.I Baú – 1.540.930 hectares, 188 personnes. Réserve homologuée dans l’état du Pará. Ville : Altamira. 2 peuples y vivent : Mebêngôkre (Mebêngôkre Kayapó Mekrãgnoti, langue jê) et isolés Pu’Ro.
  • T.I Capoto/Jarima – 634.915, 22 hectares, 1388 personnes. Réserve homologuée dans l’état du Mato Grosso. Villes : Peixoto de Azevedo, Santa Cruz do Xingu, São José do Xingu. 2 peuples y vivent : Mebêngôkre (Mebêngôkre Kayapó Metyktire, langue jê) et Tapayuna (langue jê)
  • TI Kapôt Nhinore – en cours d’identification . Etats du Mato Grosso et du Pará. Villes : Santa Cruz do Xingu, São Félix do Xingu, Villa Rica. 3 peuples y vivent : Mebêngôkre (Mebêngôkre Kayapó Menkragnoti, Mebêngôkre Kayapó Metyktire, langue jê) Yudja (langue juruna) et isolés Ccapot/Nhinore.
  • T.I Kararaô – 330.837,54 hectares, 58 personnes. Réserve homologuée dans l’état du Pará. Ville : Altamira.
  • T.I Kayapó – 3.284.004, 97 hectares, 4548 personnes. Réserve homologuée dans l’état du Pará. Villes : Bannach, Cumaru do Norte, Ourilândia do Norte, São Félix do Xingu. 2 peuples y vivent : Mebêngôkre (Meb$engôkre Kayapó Gorotire, Mebêngôkre Kayapó Kôkraimôrô, Mebêngôkre Kayapó Kuken Kran Krên, langue jê) et isolés du Rio Fresco.
  • T.I Las Casas – 21.344 hectares, 409 personnes. Réserve homologuée dans l’état du Pará. Villes : Floresta do Araguaia, Pau d’Arco, Medençao.
  • T.I Mekrâgnoti – 4.914.254, 82 hectares, 1264 personnes. Réserve homologuée dans les états du Pará et du Mato Grosso. Villes : Altamira, Matupá, Peixoto de Azevedo, São Félix do Xingu. 2 peuples y vivent : Mebêngôkre (Mebêngôkre Kayapó Mekrâgnoti, langue jê) et isolés de l’Iriri Novo.

 

Photo aérienne du village circulaire des Mekrãgnoti, ayant au centre la maison des hommes. Photo : Gustaaf Verswijver, 1991.

  • T.I Trincheira/Bacajá – 1.650.939 hectares, 746 personnes. Réserve homologuée dans l’état du Pará. Villes : Altamira, Amapu, São Félix do Xingu, Senador José Porfirio. 2 peuples y vivent : Mebêngôkre (Mebêngôkre Kayapó Kararaô, langue jê) et Xikrin (Mebêngôkre) langue jê.
  • T.I Xikrin do Cateté – 439.151 hectares, 1183 personnes. Réserve homologuée dans l’état du Pará. Villes : Agua Aazul do Norte, Marabá, Parauapebas. 3 peuples y vivent : Mebêngôkre Kayapó (langue jê), Isolés de la T.I Xikrin do Cateté et Xikrin (Mebêngôkre, langue jê).

Vie sociale

Les activités féminines

 

Mulheres indígenas do povo Kayapó durante atividade extrativista — Foto: Cléber Oliveira de Araújo/Instituto Kabu

Les femmes sont celles qui produisent les aliments caloriques. Les champs de culture sont gérés par elles et chaque famille a ses propres champs de culture où sont plantés avant tout des patates douces, du maïs, de la canne à sucre, des bananes et du manioc ainsi que certains fruits tropicaux, du coton et du tabac.

Ce sont les hommes qui coupent les arbres des parcelles à cultiver au début de la saison sèche (en mai) et y restent quelques mois jusqu’à la saison des pluies. Les arbres abattus sont ensuite brûlés pour produire une cendre qui va servir de fertilisant, c’est leur seul fertilisant pour nourrir une terre qui est d’origine pauvre en nutriments. Ensuite les femmes commencent à planter. Il y a toujours des plantes médicinales plantées autour des champs.

La vie des femmes est monotone, bien souvent elles passent leur temps à la maison et ne sortent que pour aller faire des cueillettes dans la forêt de fruits sauvages et de palmes.

Les activités masculines

 

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Les hommes quand à eux sont très mobiles, toutes leurs activités se déroulent en dehors de la maison : la chasse, la pêche, la marche, la fabrication des objets et des outils, les discussions dans la maison des hommes. Les hommes ne participent pas aux activités domestiques dans les maisons.

Les viandes préférées à la chasse sont les viandes riches en matières grasses comme celle du tapir ou du pécari à collier ou encore du cerf. Mais ces grands mammifères ne sont pas toujours facile à trouver.

Les oiseaux sont chassés pour leurs plumes, les félins quand ils sont sur le chemin (jaguar, puma, chat sauvage) mais ils ne sont pas spécialement recherchés car ils pensent que leur viande est porteuse de maladies. Les singes, les coatis et les jabutis (tortues) par contre sont chassés fréquemment et jouent un rôle essentiel dans l’alimentation.

Les chasseurs chassent seuls avec des fusils à présent car les arcs et les flèches ainsi que la lance sont surtout utilisés dans les cérémonies solennelles ou quand ils n’ont pas de munition.

Un chasseur ne revient jamais bredouille, même s’il ne rapporte pas de gibier il ramène des plantes médicinales, des fibres pour les objets utilitaires ou des fruits sauvages.

Quand il ramène une proie il la donne à sa femme, s’il est célibataire il la donne à sa mère ou à sa sœur. Le chasseur renonce à manger ce qu’il a chassé mais profite des proies des autres chasseurs en un échange constant qui assure la répartition de la viande dans la communauté.

La pêche est pratiquée toute l’année mais surtout  à la saison sèche quand le niveau de l’eau est bas, les prises sont plus faciles et l’utilisation du timbo qui empoisonne les poissons d’une partie délimitée de la rivière rend plus simples encore les prises.

 

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Organisation sociale

Les villages sont constitués de maisons construites autour d’une grande place ouverte au centre de laquelle se trouve la maison des hommes où les associations politiques masculines se rencontrent chaque jour. Ce centre est un lieu symbolique, c’est l’origine et le cœur de l’organisation sociale et rituelle des Mebêngôkre.

Les Mebêngôkre sont monogames. Lorsqu’un homme se marie il quitte sa maison pour aller vivre dans la famille de sa femme. Les femmes ne quittent jamais la résidence maternelle.

Une maison abrite plusieurs familles (la grand-mère et son mari, ses filles et leurs maris ainsi que leurs enfants).

Organisation politique

Dans la société Mebêngôkre aucun chef ne gère pleinement le village. Chaque association a deux chefs exerçant la juridiction de leur propre groupe. Pour devenir chef il faut un enseignement spécial qui a lieu la nuit au domicile des anciens chefs. Les connaissances transmises sont énormes et variées, elles comprennent également un répertoire de chansons et de récits avec exhortation et incitations morales pour que les gens se préparent à un rituel, dansent de façon appropriée, se parent convenablement. L’éloquence est cruciale pour être dirigeant. Les Mebêngôkre préfèrent les chefs combatifs aux faibles. La première qualité (combativité) renvoie à la vertu masculine qui tient lieu de force physique, d’indifférence à la douleur, de la capacité d’être un bon guerrier et de défendre les intérêts de l’association et de la communauté contre les menaces. La seconde qualité (éloquence) est essentielle pour maintenir et promouvoir l’unité.

Cosmologie et rituel

Le village est le centre de l’univers Mebêngôkre , l’espace le plus socialisé. La selva environnante est considérée comme l’espace antisocial où les hommes peuvent se transformer en animaux ou en esprits, tomber malades pour une raison apparente ou même assassiner leurs proches. Des êtres mi animaux/mi humains y habitent.

Les rituels Mebêngôkre sont variés et nombreux, leur importance et leur durée varient grandement.

Ils sont divisés en 3 catégories principales : les grandes cérémonies de confirmation des noms personnels, certains rites agricoles, de chasse, de pêche, et conjoncturels (ceux pratiqués par exemple lors des éclipses solaires ou lunaires) et les rites de passage.

Dans les rites de passage, toutes les cérémonies sont classées dans le genre mereremex (les gens qui étendent leur beauté) faisant référence ) la manière élaborée dont les hommes se parents en de telles occasions.

Le but de cette cérémonie est de socialiser les valeurs « sauvages » ou antisociales.

Le thème central des cérémonies Mebêngôkre  est l’attribution du nom.

Les noms de personnes sont considérés comme un prêt de la nature. Ce sont les chamans qui en entrant en contact avec les esprits naturels apprennent d’eux les chansons et les différents noms.

Les amis rituels des enfants honorables dans la dernière étape d'un rituel de dénomination. Photo : Gustaaf Verswijver, 1991.

Il y a 2 catégories de noms de personnes, les noms communs et les noms « beaux » ou « grands ». les sources d’inspiration sont multiples : des références à l’environnement, des parties du corps, des expériences personnelles. Les beaux noms ont deux parties : un préfixe cérémoniel et un suffixe simple. Il y a 8 suffises cérémoniels qui ne peuvent être traduits. Chacun correspond à une catégorie cérémonielle. Quelques jours après la naissance, l’enfant reçoit un certain nombre de noms communs et beaux. Les deux peuvent être utilisés mais il est plus élégant que le nom soit confirmé lors d’une cérémonie.

La mort

Ils pensent que les esprits des morts vivant dans un village isolé quelque part dans les collines. Ce village est organisé comme le village des vivants mais la différence essentielle réside dans le fait que les esprits vivent la nuit et craignent le jour. C’est pourquoi les Mebêngôkre craignent d’être dans la forêt la nuit.

Les morts sont enterrés dans un espace précis, en dehors du cercle du village. La tombe est constituée d’un puits circulaire dans lequel le corps est placé en position assise le visage orienté vers l’est. Le fossé est recouvert avec des objets personnels du défunt ainsi que des légumes, des armes etc....

source : pib.socioambiental.org

Ci-dessous deux autres articles complémentaires : 

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Peuples originaires, #Brésil, #Mebêngôkre, #Kayapó

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