Brésil : Le peuple Zoró
Publié le 30 Juin 2020
Peuple autochtone du Brésil vivant dans le nord-ouest du Mato Grosso et le sud du Rondônia. Au XX e siècle leur vaste territoire a été envahi par les exploitants du caoutchouc et les sociétés minières. Avec l’inauguration de l’autoroute Cuiabá – Porto Velho en 1961 un flot de colons, d’agriculteurs et de posseiros (petits agriculteurs sans titre) affluent sur le territoire. Face à l’aggravation des conflits plusieurs expéditions dites de « pacification » sont organisées.
Les Zoró sont contactés officiellement en 1977, ils sont les derniers tupí mondé a aborder les fronts de l’expansion régionale.
Ces dernières années l’association Pangyjej (APIZ) prend des initiatives pour la protection de la T.I Zoró et ses ressources naturelles et soutient l’éducation scolaire et la mise en œuvre d’activités productives comme la récolte de noix du Brésil.
Population : 711 personnes (2014)
Le nom
Les documents historiques les plus anciens ne distinguaient pas les Zoró des autres peuples de la famille linguistique tupí-mondé appelés cinta larga ou cinturón largo. En dehors d’eux ce nom englobait les Cinta Larga, les Suruí et les Gavião habitant jusqu’au milieu du XXe siècle les forêts tropicales denses englobant les bassins des rios Aripuanã et Roosevelt dans le nord-ouest du Mato Grosso et le sud-est du Rondônia. Ces peuples portaient une ceinture et construisaient des malocas oblongues similaires. Les caucheros, les chasseurs et les garimpeiros les appelaient cabezas-secas (têtes sèches) sans doute à cause de la coutume de se couper les cheveux lors des maladies ou des deuils. Selon le journaliste Cesaríon Praxedes en 19777 : Zoró est le nom qui est resté de la dénomination monshoro utilisée par les Suruí pour désigner leurs voisins et ennemis. Monshoro est un mot méprisant dont les Suruí n’expliquent pas le sens. Au fil du temps il a été abrégé en shoro et finalement en Zoró. (Praxedes, 1977a).
Autodésignation : eux-mêmes se désignent comme pangyjej mais ils ont assimilé le nom de zoró qui s’est répandu dans le contexte de leurs relations avec la société nationale.
Langue : zoró de la famille linguistique mondé du tronc tupí.
Localisation et terre indigène
Il y a 23 villages répartis inégalement dans tous les quadrants de la T.I.
- T.I Zoró – 355.789 hectares, 711 personnes, réserve homologuée. Ville : Rondolândia. 2 peuples y vivent : Zoró (langue mondé) et isolés du nord de la T.I Zoró.
Organisation sociale
Village Zoró, Terre Indigène Zoró, Mato Grosso. Foto: Kim-Ir-Sen/Agil, 1987
L’organisation sociale est présente sous la forme de groupes locaux (villages) de dimensions variées occupant différents endroits du territoire traditionnel et dotés d’une autonomie politique et économique (Brunelli, 1989). En l’absence d’autorité et de pouvoir politique centralisé les divisions n’étaient pas rares dans le passé mais le lien de parenté et les obligations rituelles et festives favorisaient le maintien de la relation d’alliance et de coopération. Chaque groupe local était composé de une ou plusieurs familles élargies (une unité de parents de sang et de proches) réunies autour d’un homme prestigieux (zapijaj, le propriétaire). Le village comprenait 1 à 3 grandes malocas oblongues près des pistes de chasse qui commençaient radialement des malocas. L’affiliation à ces groupes locaux se faisait par la lignée paternelle et pour les jeunes couples la résidence était uxorilocale (le marié va vivre dans la maison de son beau-père).
Le système de parenté zoró dans ces grandes lignes ressemble aux autres peuples tupí-mondé reconnus par l’articulation du mariage avunculaire.
Dans les années 1960 les Zoró étaient constitués de 9 à 10 groupes locaux Zabeap Wej et 16 ou 16 malocas pour une population d’un millier de personnes ;
Zabeap Wej (3 malocas), Pangyjej Tere (5 malocas), Joiki Wej, Jej Wwej, Pama-Kkangyn Ej, Maxin Ej, Ii-Andorej, Pewej, Angojej, Kirej (chacun une seule maloca) (Brunelli, 1987a, 1989).
Pour les tupí-mondé les villages anciens constituent des sortes de cimetière en raison des coutumes funéraires qu’accompagne la restriction du nom du mort. Les morts en effet étaient enterrés dans la maison, enroulés dans un hamac et placés à plus d’un mètre de profondeur, ses biens étaient détruits et ses animaux domestiques euthanasiés. Il y a pour cette raison des fragments de céramiques et des instruments lithiques dans les anciennes malocas.
Artisanat et fêtes
Comme marque distinctive d’identité les Zoró arboraient le tatouage zoli, une rainure bleuâtre autour du visage. Les adultes avaient le septum nasal perforé pour y glisser une plume de perroquet. Dans la lèvre inférieure percée également ils y mettaient la méthiga.
Les hommes lors de certaines fêtes portaient des plumes d’épervier et de perroquet enchâssés dans une double couronne de tacuara (bambou) ajustée sur la tête.
Ces objets étaient confectionnés par les hommes dans le bekã, un camp près du village où ils enseignaient également leurs compétences aux plus jeunes.
Les fêtes dans la tradition se tenaient à la saison des pluies à l’occasion de la récolte du maïs.
Pour les principales fêtes, les chamans répondaient aux demandes reçues des esprits correspondants. En général chaque village en réalisait au moins un chaque année qui se prolongeait pendant 3 mois.
La fête la plus importante était Gojanej, elle célébrait la visite de l’esprit des eaux. Le chaman incorporait l’esprit Malula (panier de tatou) que les participants devaient combler de cadeaux, lui servir de la chicha et des galettes de maïs.
Lors de la fête Zagapuj, les chamans invoquaient les esprits protégeant la chasse, l’extraction du miel et la récolte des fruits. En récompense des esprits, les familles exposaient sur des poteaux autour du village des produits cultivés comme le manioc, la cará, du coton.
Lors de la fête Bebej (cochon-pécari) le chaman communiquait avec le propriétaire des pécaris à la recherche d’informations précieuses pour les chasseurs comme l’emplacement des bandes de pécaris.
La fête Gat pi (chemin du soleil) s’adressait aux esprits habitant le monde céleste.
Activités de subsistance
Les jardins sont situés à proximité des villages. Les hommes abattent les arbres des parcelles de forêt et préparent le terrain. Ce sont les femmes qui plantent et qui récoltent. Les cultures sont le manioc doux, les haricots, les arachides, différents tubercules, les bananes, le coton, le tabac, le poivre. Le manioc amer et le maïs sont plantés en plus grande quantité. Ils entrent dans la composition de différents plats ainsi que de boissons.
La chasse est une activité masculine qui a lieu la nuit, par des hommes seuls ou en groupes sur les sentiers autour du village dans une zone circulaire de 5 à 15 km de rayon. Les garçons apprennent très tôt en jouant avec des arcs miniatures et des flèches s’entrainant pour leur vie d’adulte. Les adolescents sont compétents dans l’utilisation des armes de chasse, la fabrication et les connaissances de l’habitat des animaux et de la forêt en général.
Pendant la saison sèche de grandes expéditions de pêche collective avec la technique du timbo sont organisées dans les petits cours d’eau, les lacs presque secs.
De nouvelles activités productives ont existé vers 1985 dans certaines zones avec le travail dans l’extraction du caoutchouc dans le but d’obtenir de l’argent pour acheter des biens de consommation. Les résultats n’ont pas été très significatifs.
Enseignement scolaire
Petite fille Zoró, village scolaire Zawa Karej Pangyjej, Terre indigène Zoró, Mato Grosso. Photo : APIZ-Associação do Povo Indígena Zoró Pangyjej, 2007
L’enseignement scolaire a commencé en 1989 dans le village de Bobyrej qui avait déjà des enseignants autochtones. A l’époque les enseignants utilisaient des amorces dans la langue gavião. Entre 1991 et 1994 le pasteur luthérien Iismael Tressmann, la linguiste Ruth Montserrat et le professeur WwaratãnZoró forment une nouvelle proposition orthographique et un manuel avec des histoires du peuple Zoró (Tressmann, 1994). Cette année-là il y avait à peine 2 écoles dans les grands villages, en 2005 il y en avait déjà 10 en plus de l’école de Zawã Kanej.
Le village scolaire de Zawã Kanej comprend un complexe de bâtiments de style tupí-mondé avec des salles de classe, un réfectoire, des logements, des salles de bain, desservant 80 élèves du premier cycle d’enseignement d’alternance. Les étudiants vont à l’école une partie du mois et dans l’autre ils restent dans leur village d’origine. D’autres écoles ont vu le jour depuis notamment une nouvelle école dans le village de Zarup Wej à l’attention de 50 élèves en alternance également.
Organisation
APIZ - Association du peuple indigène Zoró
Source : pib.socioambiental.org