Pérou - Le peuple Uro

Publié le 9 Juillet 2019

De Andydub - Trabajo propio, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=15016396

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Les Uros sont un peuple indigène situé dans la baie de Puno, dont la majorité de la population s'est installée depuis des siècles dans d'énormes radeaux de totora appelés "îles flottantes", qui naviguent sur les eaux du lac Titicaca. Leur langue appartient à la famille linguistique Uru-Chipaya.

Adaptés à leur environnement naturel, les anciens Uros avaient comme activité principale la pêche et la chasse aux oiseaux qui habitent le lac, développant aussi des connaissances et des pratiques liées à la manipulation des totora qui sont utilisées jusqu'à présent pour la confection des "îles flottantes", maisons et navires du même matériel.

Le 18 janvier 2013, le Vice-Ministère du Patrimoine Culturel et des Industries Culturelles du Ministère de la Culture, a déclaré Patrimoine Culturel de la Nation aux " connaissances et pratiques ancestrales de gestion des totora développées par le groupe original Uro, situé au lac Titicaca, région de Puno ", précisant que " ces éléments du patrimoine culturel immatériel démontrent la capacité créative de ce groupe à s'adapter à son habitat par des solutions originales, constituant une expression de l'identité culturelle du groupe Uro concerné.

Grâce au fichier envoyé par la Direction Régionale de la Culture de Puno, pour la déclaration en question, on sait que la population qui s'identifie comme faisant partie du peuple Uro vit principalement dans les îles flottantes du lac Titicaca, dans la Réserve Nationale du même nom.

Autres noms
Uru

Références géographiques
Lac Titicaca

By Peter van der Sluijs - Own work, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=18855893

bateau de totora - De Rodolfo E. Edelmann - Trabajo propio, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=9496745

bateau de totora - De Rodolfo E. Edelmann - Trabajo propio, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=9496745

Une indigène âgée de 90 ans en train de moudre de la quinoa sur l'île des Uros -De Rodolfo E. Edelmann - Trabajo propio, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=9496651

Histoire 


Les origines du peuple Uro remontent à des temps antérieurs aux Incas. Selon plusieurs chercheurs, les Uros seraient un groupe des plus anciens habitants du plateau de Collao. Julio Delgadillo (1998) soutient qu'il existe des preuves archéologiques qui permettent d'estimer que les ancêtres du peuple Uro ont occupé la région en 1200 av. J.-C. D'autres chercheurs ont pour leur part relié les origines du peuple Uro à la période dite précéramique, entre 3000 et 2000 av. JC (RDC Puno 2012).

Le Collao est une région qui a connu des occupations successives. Entre le premier et le treizième siècle se trouvaient les Tiawanaku qui auraient habité cette région, qui seraient les porteurs de la langue Puquina, peut-être la langue originaire des Uros (Bouysse-Cassagne 1987). Après la disparition des Tiawanaku, cette zone a été occupée par plusieurs royaumes Aymaras, qui auraient assimilé les premiers habitants, dont les Uros, les acculant à un habitat plus approprié : le lac, le fleuve Desaguadero et ses affluents, et en intégrant d'autres à la société agricole Aymara (Prada 2008).

Après la conquête du Collao par les Incas, les Uros auraient été incorporés à l'empire par le paiement de taxes, ces taxes étant le poisson et la fabrication de pétas de paille (Prada 2008, Delgadillo 1998).

By TeshTesh - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=45281064

Les premiers rapports coloniaux concernant ce peuple remontent à la décennie 1570, sous le gouvernement du vice-roi Francisco de Toledo. Après un voyage dans la province de Charcas, aujourd'hui partie du territoire bolivien, Toledo explique l'existence de deux groupes ethniques dans le Collao : Aymara et Uro.

La proportion d'Aymaras et d'Uros dans les encomiendas de Charcas et de Cusco était estimée à 3 pour 1, ce qui expliquait la prédominance de la langue Aymara. Selon Therese Bouysse-Cassagne (1987), cette relation sera maintenue 40 ans plus tard. A cette date, en outre, il y a une population Uro qui parle indistinctement Uroquilla, Puquina, Aymara et Quechua. Cela suppose qu'en tant que groupe, les Uro condensent d'une certaine manière les diverses étapes historiques traversées par la zone : la première, la plus éloignée, serait celle des Uros uroquilophones ; la deuxième, celle des uros puquinaphones, qui représentent l'influence Tiawanaku ; la troisième, celle du groupe Aymara (Bouysse-Cassagne1987).

Au cours des dernières décennies du XVIe siècle, il y a eu plusieurs références au peuple Uro ; liées à la fiscalité, à la localisation des personnes sur le plateau du Collao, à leurs relations avec les populations Aymara et Quechua, à leur évangélisation, à leur langue et à leurs coutumes. Les chroniqueurs Martín de Murúa et Baltasar Ramírez, en 1590 et 1597 respectivement, ont mentionné ce peuple et la façon dont ils vivaient dans des maisons construites sur totora qui flottaient sur l'eau (Delgadillo 1998).

Au XVIIe siècle, les mentions du peuple Uro se feront de plus en plus rares, mais les documents des voyageurs qui visitèrent la région de l'Altiplano au XIXe siècle feront à nouveau référence à ce peuple, à son emplacement et à la population estimée d'Indiens Uro. Par exemple, l'historien José Toribio Polo a fait un voyage dans la région de Desaguadero en 1873, à partir duquel il a estimé que la population des Indiens Uro dans les haciendas du même nom au Pérou et en Bolivie était de 809 personnes (RDC Puno 2012).

Au cours des dernières décennies, le secteur touristique a commencé à se développer dans le Puno et avec cela, les Uros ont commencé à redevenir visibles en tant que peuple originaire. Bien qu'à l'heure actuelle les Uros n'aient pas leur propre langue puisque la plupart d'entre eux parlent l'aymara comme langue maternelle, on sait que la population de la communauté Uros Chulluni Campesino a conservé l'uro comme langue maternelle jusqu'aux années 1920 (RDC Puno 2012).

Au milieu des années 80, la région de Puno a été touchée par une série d'inondations. Ces inondations ont touché la population Uro qui habitait certaines îles flottantes, car elles ont entraîné le déplacement d'un nombre important d'îles de la partie nord vers la partie sud de la réserve naturelle Titicaca.

Institutions sociales, économiques et politiques


Harriet Klein (1973) soutient que, bien qu'à ses débuts, le peuple Uro ait été caractérisé par des unions conjugales au sein du groupe, les échanges croissants avec le peuple Aymara dès les premiers temps ont motivé l'augmentation des unions conjugales entre Uros et Aymaras.

Les Uros habitent principalement dans d'énormes radeaux de totora qui flottent sur le lac Titicaca, les "îles flottantes". Une caractéristique de ce type d'île est que, de construction récente, elle abrite généralement une ou deux familles. Avec le temps et l'accroissement naturel de la population, la surface de l'île s'étend continuellement (RDC Puno 2012).

En raison de l'emplacement de ce peuplee, l'eau a été la ressource naturelle la plus importante pour les Uros. Ainsi, le peuple est traditionnellement compose d'un collectif de pêcheurs, de chasseurs d'oiseaux, de collecteurs et de coupeurs de roseaux, un élément déterminant dans l'écosystème du lac Titicaca. Cependant, avec le temps, de nombreux Uros ont été contraints de quitter les îles flottantes et de migrer vers le continent, devenant progressivement des agriculteurs en raison de facteurs démographiques et écologiques (Klein 1973). Leur condition de pêcheurs, de chasseurs et de cueilleurs dans l'habitat du lac Titicaca prouve qu'avant les Incas, les Uros étaient une population semi-nomade, obligée de se contenter de la perception de taxes (Prada 2008).

La présence du tourisme dans la région de Puno au cours des dernières décennies a provoqué des changements importants dans le mode de vie des familles Uro. Actuellement, de nombreuses familles Uro font partie du circuit touristique visant à promouvoir la visite de touristes nationaux et étrangers sur les îles dites " flottantes des Uros ". Lors de ces visites, les familles offrent des services tels que des promenades en radeaux totora, la vente d'artisanat, le tourisme expérientiel, entre autres (RDC Puno 2012).

By User: Bgabel at wikivoyage shared, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=22958794

D'après les informations systématisées par la Direction Régionale de la Culture de Puno (2012) sur le peuple Uro, on sait qu'une grande partie des hommes Uro se consacre au transport des touristes vers les îles dites "flottantes des Uros", tandis que de nombreuses femmes ont comme activité exclusivement rémunérée la vente d'artisanat. Ce sont surtout les femmes uro qui, profitant des matières premières disponibles telles que la laine de mouton, la fibre d'alpaga et le totora, produisent une quantité importante d'objets artisanaux à vendre, y compris des couvertures et sacs à dos brodés, chuspas, chullos, étuis et autres tissus, ainsi que du travail du totora (DRC Puno 2012).

Dans l'intervalle, la population des îles flottantes situées plus loin du lac Titicaca, et qui ne participe pas au circuit touristique, se consacrerait davantage aux activités productives traditionnelles, telles que la pêche, la chasse et la cueillette.

La perte de leur langue d'origine, ainsi que l'intégration d'activités économiques non traditionnelles dans leur vie quotidienne (comme l'agriculture, depuis l'époque préhispanique et le tourisme il y a quelques décennies), ont généré un courant d'opinion qui suggère que les Uros feraient partie des Aymaras en tant que groupe ethnique majeur. Malgré cela, les Uros eux-mêmes font un effort important pour valoriser la culture et la langue d'origine de ce groupe.

Langue


Bien que le peuple Uro conserve une forte identité culturelle, pendant près d'un siècle, il ne parle plus sa langue d'origine, l'uro, qui appartenait à la famille linguistique Uru-chipaya (aussi appelée Uruquilla). Aujourd'hui, seule la langue Chipaya est parlée sur le territoire bolivien. Actuellement, le peuple Uro a comme langue maternelle l'aymara, suivi du quechua. Beaucoup d'Uros parlent aussi l'espagnol comme première ou deuxième langue. Dans le but de retrouver et de renforcer leurs traits identitaires, les Uros prennent aujourd'hui, avec le soutien du ministère de la Culture, des initiatives pour retrouver la connaissance de leur ancienne langue disparue.


Croyances et pratiques ancestrales


Le peuple Uro a été largement connu pour l'utilisation traditionnelle de la totora, une plante vivace qui constitue la ressource naturelle par excellence des habitants qui, depuis l'antiquité, se sont installés autour des zones humides et des marais du lac Titicaca. Tout au long de leur histoire, les Uros ont donné à la totora deux usages principaux, qui ont été essentiels à la subsistance de leur peuple : premièrement, la totora a été une ressource essentielle pour la construction de grands radeaux habitables, "îles flottantes" où vivent encore un grand nombre de familles Uro. Et, d'autre part, les Uuros ont utilisé la totora pour construire des bateaux de pêche, de chasse et de ramassage d'œufs d'oiseaux dans le lac, qui servent également de moyen de transport (RDC Puno 2012).

La construction d'"îles flottantes", comme les bateaux lacustres, est l'une des pratiques ancestrales du peuple Uro, et fait référence aux connaissances que les Uros ont transmises de génération en génération jusqu'à nos jours. Un exemple de la façon dont ces connaissances et pratiques ont été le résultat de leur adaptation à l'environnement et aux ressources disponibles, est que la construction de bateaux en roseaux a l'avantage de ne pas contribuer à la pollution du lac comme ceux propulsés par moteur. D'autre part, cette pratique profite pleinement de l'abondante disponibilité de totora comme matière première (RDC Puno 2012).

En raison des contacts soutenus que les peuples Uro et Aymara entretiennent depuis l'époque préhispanique, il est difficile de distinguer les croyances ancestrales dont les origines sont uniquement liées au peuple Uro. Peut-être l'une des rares preuves que nous avons aujourd'hui de la cosmovision du peuple Uro est la découverte de céramiques à Tiahuanaco, dont les dessins et décorations représentent la lune. On pense que la lune aurait été la divinité principale de ce peuple pour avoir "illuminé" les Uros dans leurs expéditions nocturnes de pêche et de chasse (RDC Puno 2012).

 

Autres données


Actuellement, le peuple Uro vit principalement dans le district de Puno et sur les îles flottantes de la baie de Puno, sur le lac Titicaca. La communauté rurale d'Uros Chulluni a été identifiée comme l'endroit sur le continent, où vit la majorité de la population reconnue comme faisant partie du peuple Uro.

Selon le recensement national de la population et de l'habitat de 2007, la population de la communauté paysanne Uros Chulluni est estimée à 550 personnes. Selon les données du même recensement, la population de six îles flottantes à proximité de cette communauté est de 100 personnes (INEI 2007).

Outre les îles flottantes situées en face de la Communauté Rurale d'Uros Chulluni, la Direction Régionale de la Culture de Puno rappelle qu'il y a un groupe de population Uro qui vit dans des îles flottantes en face de la Péninsule de Capachica et près de l'île d'Amantani. Contrairement à la première, la dynamique de ces îles n'a pas pour axe économique l'activité touristique.

Par la déclaration des connaissances ancestrales et des pratiques de gestion des totora, l'Etat péruvien reconnaît l'existence d'un "groupe originaIire reconnu comme Uro" au lac Titicaca, région de Puno. De même, il précise que l'une des caractéristiques les plus importantes de ce groupe est qu'"il vit dans d'énormes radeaux de totora, plante vivace, commune dans les estuaires et marais d'Amérique, dont la tige érigée mesure entre un et trois mètres, selon les espèces".

D'autre part, en janvier 2014, l'actuel maire de la ville d'Uros Chulluni, Víctor Panca, a demandé l'aide du Ministère de la Culture dans le projet de revitalisation de la langue uro, par lettre officielle N° 043-2014 MCPT-UCH-PUNO.

traduction carolita du site bdpi.cultura.gob.pe

https://bdpi.cultura.gob.pe/pueblos/uro

ci-dessous un article plus ancien sur les Chipayas

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Pérou, #Peuples originaires, #Uro

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