Souvenirs d’enfance : Le premier mai
Publié le 1 Mai 2019
Dans les souvenirs des premiers mai fleuristes, je choisis celui où mon grand-père était parti en voyage en URSS, je ne me souviens que du mois de mai mais non de l’année (année 1978 peut-être).
Il était parti seul car ma grand-mère était réfractaire à l’idée de se faire faire des papiers, aussi ne voyageait-elle qu’en France, dans nos frontières.
Mon grand-père avait eu l’opportunité de partir avec ses camarades de la section du PCF de Rouen certainement, à cette époque importante pour les communistes, c’est-à-dire le défilé de l’armée sur la Place Rouge le premier mai, le Kremlin, tout ça……
Il a réalisé alors le voyage de sa vie.
Il est resté parti 15 jours et a visité plusieurs régions de ce très grand pays, ils sont allés jusqu’à Bakou de ce que je me souviens.
Je me rappelle un peu de cette période particulière car j’étais restée avec ma grand-mère chez mon oncle fleuriste pour l’aider pendant cette période très importante dans le métier car c’était (et peut-être encore) la journée pour laquelle horticulteurs et fleuristes faisaient le plus de bénéfices. En une journée qu’il ne fallait pas manquer, l’argent rentrait et dans ces petits métiers artisanaux comme c’était le cas de la façon de travailler de mon oncle, cela n’était pas négligeable.
Aussi la famille participait- elle à cette réussite.
Nous avions donc, ma grand-mère et moi couché dans la cabane en rondins de mon oncle, vécu quelques jours comme des ermites dans la forêt, avec le chant du coucou au réveil.
Pendant que nous préparions toutes les petites fleurs nécessaires aux compositions, des mini fleurs accompagnant les brins de muguet, mini roses rose et jaune, gloriosa, freesia au parfum compétiteur du muguet, asparagus pour le feuillage, mousse blanche à faire tremper et à presser, bloc de mousse verte, sèche à découper de la taille des petits sujets, nous suivions le périple de mon grand-père à l’aide de son courrier, avec les paysages, les noms exotiques, les jolis timbres estampillés CCCP (Union des Républiques Socialistes Soviétiques).
On avait l’impression d’être avec lui, mais surtout on était contentes pour lui, le voyant parti avec sa chapka en fourrure sur la tête, le voyant revenir avec sa valise remplie dans laquelle, je ne sais pourquoi ni comment il avait eu l’idée de ramener une peau de vache (en couvre-lit). Ca pesait une tonne et certainement aurait-t-il pu en trouver une, ici en France.
Jusqu’à la fin de leur vie mes grands-parents ont eu cette peau sur leur lit. Ca me semblait rêche et raide, pas très voluptueux pour le sommeil, j’ai toujours trouvé cela bizarre et même drôle quand j’y pense mais mes grands-parents n’étaient-ils pas les maîtres de la taxidermie ?
Mon grand-père m’a rapporté des enveloppes premier jour, je collectionnais les timbres à cette époque, j’y tenais beaucoup.
A l’heure où je tente de refaire une petite collection de timbres (anticonformiste je précise) en rapport avec les oiseaux, histoire de m’occuper sainement, je repense à ma collection de timbres et aux souvenirs qui s’y rapportent.
Je pense aux premiers mai quand le parfum délicat et tenace du muguet envahi tous les espaces, quand la crainte de le « perdre » au cours de la journée est là aussi comme une épée de Damoclés, je me souviens de mes anciens, et non, je ne pleure pas car rien n’est triste.
En ce jour de premier mai où mon beau-frère vient de décéder à son tour, j’ai une pensée pour lui, car sans être très proches, nous avions deux points communs : les timbres (et lui en tant que collectionneur conforme) et les oiseaux.
Que le fou de Bassan emporte son principe vital là où la jonction se fait, entre ici et l’au-delà où la souffrance corporelle n’a plus lieu d’être.
Carole Radureau (01/05/2019)
Si tu portes bonheur
Si tu portes bonheur
Muguet
C’est par le don de fleur
Qui lève avec ardeur
Un parfum envoûtant.
Si tu portes chance
Muguet
Comme la coutume veut le croire
C’est par la fraîcheur de ton haleine
Et le doux son calfeutré
Sorti du cœur de tes clochettes.
Le bonheur est ici en chacun de nous
Il s’appelle paix
Il s’appelle joie
Le fait d’être
D’en avoir conscience :
C’est une vérité essentielle.
Il est bon de ne pas chercher
L’on sait que c’est ici même
Il est bon de penser aux autres
De leur souhaiter le meilleur
Et si le muguet chantait le chant de la pleine conscience
Dans la blanche lueur du jour qui fuse
Sans inquiétude
Prendre soin de cette heure
La savourer :
L’essentielle
Avec le parfum entêtant de la fleur
Qui s’illumine en ce jour.
Carole Radureau (01/05/2019)