Cosmovision Huitoto - Nofideño la Grande Mère

Publié le 28 Mars 2019

Les indigènes Huitoto (ou Witoto) vivent dans la partie méridionale du département de l'Amazonas colombien. On estime que ce groupe ethnique compte une population de 6 245 personnes. Les Huitoto parlent divers dialectes selon la zone où ils s'installent. Cette histoire est tirée des Paroles d'origine, de la Bibliothèque de base des peuples autochtones de Colombie, du ministère de la Culture. L'auteur de ce recueil est le philosophe colombien Fernando Urbina. La narration est la suivante :

Elle s'appelle Nofïdeño et elle est la mère de tout. Elle génère les tremblements, qui se produisent quand elle change la terre de poste et secoue tous les arbres fruitiers de sorte que les fruits s'alternent et peuvent ainsi augmenter le nombre de personnes.
Elle se blottit pour accoucher et quand elle le fait elle a  la force nécessaire pour donner naissance aux fruits, les secousses de la terre surgissent, ce que nous appelons des tremblements de terre.
Elle change la terre d'épaule et vérifie les arbres de l'autre côté. De cette façon, elle se repose, mais la terre tremble ; puis elle dit :

"Pourquoi mes enfants ne veulent-ils pas grandir ? Je vais les regarder."

Puis elle enlève le monde de son épaule et cherche parmi les arbres ceux qui sont stériles, qui ne portent pas de fruits, et elle les arrache, les jette et les échange pour de bon, afin que toutes les femmes donnent naissance à des enfants sur cette terre, afin que les fruits travaillés par l'homme ne soient pas gaspillés. Et c'est très clair, car plus le nombre de personnes est réduit, plus on gaspille de fruits.

De là vient notre coutume selon laquelle si un homme a une femme, si elle est stérile, ils se séparent, mais si elle est une bonne travailleuse, qu'il apprécie sa diligence il reste avec elle, tant que l'homme a une autre femme avec laquelle avoir des enfants. Et maintenant, passons à l'histoire.
Après avoir fait ces mouvements, nous sommes nés. Le tabac, la coca et les arbres fruitiers sont également nés. C'est notre mère Buinaiño qui nous a donné naissance dans ce pays. Elle est la même Nofïdeño.
Buinaiño nous a donné du lait maternel et a ensuite laissé ce pouvoir à toutes les femmes d'élever des enfants avec uniquement du lait ; et les enfants peuvent ainsi prendre du poids et grandir en se nourrissant uniquement de liquide.
Buinaiño, après nous avoir donné naissance, s'est secouée en essuyant toute la terre qu'elle avait avant et est devenue une jeune fille. Les ordures elle les laissé tomber au loin où elles sont devenues des arbres dont les fruits ne sont mangés que par les bêtes. Ce furent les premiers fruits connus sur terre.
Après avoir tout mis au monde, elle était heureuse de voir ses enfants grandir bien vaillants, sans aucune maladie. Puis elle leva les yeux et vit qu'elle n'était plus seule, parce que d'en haut la regardait notre père Juzíñamui, qui regardait et qui s'occupait du monde. Puis elle baissa les yeux et vit Buinaima, s'occupant aussi de ses enfants pour qu'il ne leur arrive rien.

C'est à partir de ce moment que Buinaiño a pris plusieurs noms :

"Mère des fruits", "Mère de l'humanité", "Mère des fleuves",
"Messagère de Juzíñamui" et "Mère de la Création".
Elle a tout trouvé au milieu des rêveries et nous l'a apporté. Nous ne la voyons pas parce qu'elle vient toujours en rêve.

Elle est très heureuse et change la terre d'une épaule à l'autre ; c'est quand nous crions que la terre vient sur nous, que le monde va se retourner, que le monde va se briser, et tout cela est une fausse alerte : rien ne se passe.
Elle, Buinaiño, est la propriétaire de tout. Pour que nous nous souvenions d'elle, elle fait que la terre tremble quand elle la change d'épaule, pour que nous réalisions que nous sommes ses enfants et qu'il y a un être suprême qui domine la terre.
Nous sommes nés de femmes, mais celle qui nous donne naissance dans ce monde n'est pas notre mère, c'est juste une image de Buinaiño. C'est elle qui nous donne vraiment la vie. Il en va de même pour le père : celui qui est présent n'est pas notre père lui-même, il n'est qu'une image de Juzíñamui et Buinaima, ce sont eux qui nous donnent vie.
Nous disons moo, ou "papa", parce qu'il nous élève et prend soin de nous.
Quand il tremble, nous lui demandons : "Qui fait le mouvement ?" et la coca nous dit à travers nos rêves que c'est notre mère qui le fait, qu'elle s'appelle Nofïdeño et qu'elle est née avant que la terre soit née.
Elle connaît les noms de toutes les choses sur terre parce qu'elle a donné naissance et nommé tous les êtres. C'est pourquoi nous lui appartenons et nous la respectons.
Elle fait des mouvements pour que tous ses enfants se rendent compte et certains naissent avec intelligence et curiosité pour savoir ce qu'elle a fait dans ce monde, et enseignent ensuite à ceux qui sont encore en train de naître.
Notre mère, qui est douce, gentille, affectueuse et bonne, nous berce avec ses douces chansons et fait dormir le monde. C'est pendant la nuit. Quand elle se réveille, elle voit ses enfants affligés. Puis elle les baigne de ses caresses et en même temps rafraîchit le monde et apaise la soif de chacun.

C'est la rosée et la pluie.

Souvent, quand les fruits se dessèchent, pour qu'ils ne deviennent pas rabougris, elle leur envoie de l'eau pour qu'ils boivent. C'est l'hiver.

C'est pourquoi tout ce qu'elle nous a laissé, du lait maternel aux fruits, est doux. C'est là que nous avons appris à connaître le manioc, le tabac, la coca, et nous sommes aussi nés. C'est pourquoi nous avons tous une mère, y compris même les animaux qui élèvent leurs enfants avec les fruits qui sont les leurs.
Après avoir tout mis au monde, et une fois sa tâche terminée, elle s'est nommée Komuidaño, ce qui signifie "Génératrice du peuple", Créatrice, "Celle qui donne naissance".

Ce sont des choses que nous oublions aujourd'hui ; nous ne nous soucions pas beaucoup d'elles, pensant qu'ils sont l'affaire des personnes âgées. C'est pourquoi nous ne croissons pas aujourd'hui : c'est parce que nous l'avons oubliée et qu'elle, pour nous prouver qu'elle existe certainement, fait ses mouvements changeant la terre d'une épaule à l'autre. Puis elle tremble.
La Mère, en remuant tout, nous fait savoir que nous ne devons pas oublier les choses du passé, tout ce qui s'est passé, ce qu'elle a fait. Elle veut que nous la gardions tous à l'esprit pour que les gens croissent à nouveau comme ils le faisaient autrefois.
Buinaiño arrange toute la maison, range tout à sa place, baigne ses enfants afin qu'ils puissent vivre propres et grandir sans aucune maladie, et ordonne que toutes les femmes sur terre procèdent de cette façon avec leurs enfants.
Elle est "propriétaire du manioc sauvage", "propriétaire du manioc doux", "propriétaire de l'ananas", "propriétaire de l'arachide". Elle a apporté tout cela pour que le peuple le fasse pousser et l'a légué en héritage à ses enfants.

Un autre de ses noms est Bagïdaño, parce qu'elle est capable de faire et de multiplier toutes choses. Elle ne s'est jamais lassée de soutenir le monde, c'est pourquoi on l'appelle Nofïdeño, "Femme de pierre", car le soutien du monde - son squelette - est la pierre, mais elle est la même Buinaiño.
D'elle naissent toutes choses parce qu'elle est la mère du monde entier. Quand elle a pris le nom de Komuya Buinaño et Jebuya Buinaiño, qui signifie naître et grandir, c'est quand tous les gens ont commencé à se multiplier. Quand elle a dit ces deux mots, il y a eu multiplication, puis division par tribus de tout le peuple.
Nous en sommes tous issus. Certains pensent et disent sans savoir : "Je suis différent, j'appartiens aux autres !
Ils oublient que nous venons tous d'une même mère, que nous avons tous la même origine.
Après avoir tout fait, elle a pris la terre dans ses mains et y a mis du caoutchouc* pour qu'elle ne tombe pas de ses mains, pour que ses enfants ne souffrent en aucune façon.
Quand elle fait les changements de position ou les mouvements, elle prend le nom de Jerénoaño. Elle fait ces mouvements lorsqu'elle vérifie si tout ce qu'elle a fait est ferme.
Après les avoir testés, elle les met en place.
Nous faisons de même : nous essayons d'abord des choses et des fruits. S'ils sont encore verts, nous ne les prenons pas, et si un aliment n'est pas bien préparé, nous ne le servons pas, tout comme notre mère l'a fait en donnant un exemple.

Faisant ses mouvements, voyant que tout était ferme, elle installa son corps, laissant son nom gravé sur le sol : Nofïdeño.

traduction carolita du site mitos latinoamerica

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