Venezuela : Le peuple Ayamane
Publié le 19 Avril 2018
Ancien peuple du Venezuela, présent avant la colonisation sur le territoire actuel de Falcón, Democracia, Sucre, Federación, Unión et Silva, dans l’état de Lara sur la rivière Tocuyo jusqu’à la Sierra de Parapuno dans la municipalité d’Ibarren, Torres, Crespo et Urdaneta.
Aujourd’hui des descendants habitent uniquement dans l’état de Falcón, dans les communautés de Maparí , San Pedro de Maparani, La Cruz de Bucaral, La Venta, Aguada grande, Las Catalinas, et Palmar, San Miguel de Ayaman.
Langue
Ayaman ou ayoman, langue jirajaran, groupe de langues qui ont toutes disparu au début du 20e siècle. L’ayoman était parlé dans le village de Siquisique dans l’état de Lara.
Mode de vie
C’était un peuple nomade très mobile dont les familles émigrent au XXe sièlce à la recherche de terres et de travail dans la vallée de Moroturo, état de Lara et à Turén dans l’état de Portuguesa.
Ils travaillent dans les ranchs qui possèdent de grands troupeaux et dans les plantations de ces régions.
En parallèle ils ont de petites productions agricoles de subsistance, de forme familiale, faisant pousser du maïs, des haricots, du quinchoncho (pois d’angole), cajanus cajan, des ignames et de la canne à sucre.
Dans les zones arides de la vallée de Siquisique et les cardonales de Málatera, ils plantent du sisal et du cocuy (agave). Avec les fibres du sisal ils font des canots et avec du bois ils font leurs maisons, des tabourets, des instruments pour la chasse, des plateaux.
Le cucuy est cuit pour la consommation et utilisé pour produire une boisson alcoolisée.
Ils récoltent également des fruits sauvages : quenettier (mamones), cotoperiz, guanajos, semerucos (sorte de cerise), maya (bromelia chrysantha) .
Dans les régions boisées ils récoltent des palmiers, du miel et de la cire.
Certaines communautés chassent encore le cerf, le tapir, le lapin et les oiseaux mais la pratique a diminué en raison de l’expansion des ranchs de bétail et le manque d’accès aux terres boisées.
Ils ont intégré dans leur économie l’élevage de bovins, de chèvres, de moutons, de porcs et de volailles pour la consommation familiale et la vente sur les marchés locaux.
En plus ils travaillent comme salariés dans les ranchs d’élevage, les hommes migrent une fois par an pour travailler dans les grands champs de maïs et de sésame dans l’état de Portuguesa. Certaines femmes travaillent comme éducatrices, domestiques, blanchisseuses dans des communautés semi-urbaines de la région.
L’organisation sociale était décrite comme unités domestiques composées de 2 ou 3 familles nucléaires, parfois les 3 familles vivaient dans la même maison.
Las Turas
image María Perozo reine de las turas
Ils se considèrent comme toureros ou dévôts de la danse de Las Turas, une danse qui a lieu 2 fois par an en remerciement à la nature et aux esprits pour les récoltes et les bénéfices obtenus.
Il y a 2 sortes de Turas, la petite et la grande.
La petite Tura, Tura pequeña a lieu en avril ou en mai au moment où le maïs est tendre –jojoto). Les grains sont moulus, filtrés et fermentés pour faire une chicha ou un carato utilisé pendant le rituel.
La grande Tura ou Tura grande est célébrée aux mois d’août ou septembre lorsque le maïs est développé.
Ils construisent une cour avec un autel où la reine reçoit ses invités et des touristes. Sur l’autel ils placent des offrandes aux esprits (épis de maïs, canne à sucre, auyama (courge), gousses de carvi, oranges, avocats).
Autour de l’autel les participants danses au son d’une musique jouée avec des maracas, des flûtes à anche et des cornes de cerf.
Les personnes sont équipées d’une corde à l’avant-bras, ont le visage peint de lignes arquées sur le sourcils et sous les yeux avec de la peinture rouge appelée bariki préparée avec de l’oxyde de fer ou de l’ocre rouge.
Les femmes portent une couronne de feuilles de haricots, de patate douce ou autre.
Le peuple a une relation très étroite avec la nature, les gens en tirent leur subsistance mais aussi du matériau pour leur vie quotidienne, du bois pour la construction, du sisal pour fabriquer des chinchorros, le toit des maisons, des réserves à maïs. Certaines plantes offrent leurs racines, leurs graines, leurs feuilles et leurs fruits pour fabriquer des remèdes.
Je vous propose au sujet de Las Turas cette traduction que j'ai faite en complément :
Ayamans, esprits et Turas
Le mot Ayaman ou Ayoman selon Alfred Jahn, signifie dans la langue de cette tribu : homme. D'autre part, nous avons constaté que les Ayamans appartenaient peut-être à la famille linguistique Chibcha et qu'ils faisaient partie des peuples Jirajara en tant que sous-groupe (Rafael Strauss, 1992).
Ramón Querales (1995), nous dessine un possible panorama Ayamán de la manière suivante : "La terre a été labourée par tous.... De ce que nous lisons de Federmann, les chefs Ayamán, comme parmi les Maypures, représentaient la tribu, menaient les combats, la chasse et la pêche, le déplacement des villages quand, par exemple, la fertilité du conuco a été épuisée......
A travers le rituel de Las Turas, on peut déduire que la culture originelle dont est issu l'ensemble du système d'organisation de cette danse en tant que rite structurel et ancestral complexe, faisait partie des Ayamans en tant que peuples organisés, avec des formules et des normes sociales de coexistence et d'expression spirituelle. La danse rituelle de Las Turas est un rite magique agricole-dévot très particulier, transformé mais survivant et dynamique face aux changements et aux nouvelles possibilités sociales de ses peuples porteurs, profondément liés à la terre, à la nature mère : Gaia, et à l'union cosmique entre les êtres terrestres et surnaturels, unis par le mystère sacré. Le rite en tant que tel répond, à son tour, à un immense besoin humain de demander et remercier la santé abondante, les récoltes, les faveurs, la vie pleine et abondante aux enfants de cette famille descendant des Ayamans (comme un peuple turero métis et afro-amérindien).
Les pratiquants de Las Turas sollicitent la pluie, la chasse, des faveurs, une vie bien remplie, des plantes médicinales et la santé pour leurs pairs, leur culture et leur famille actuelle. Avec l'avènement de la foi catholique et d'autres religions ou philosophies étrangères, certaines pratiques associées aux Turas ou transplantations sont adoptées comme syncrétisme en tant que rite courant combiné -dynamique et changeant.
Auparavant, selon Rafael Strauss (1992), ce rituel de danse était montré dans les zones habitées par cette importante culture des descendants Ayamán où il était exécuté :
"Ils ont mis en scène Las Turas dans des communautés comme Bella Vista, El Vegón, Cerro Colorado,El Cacuro, El Tigrito, El Hueque, El Ramal, El Torito, El Cerrón, Mapararí, San Pedro, La Chara, El Chipopo, Duvisí, Pararilla, La Garza, Las Colinas, La Veguita, Los Ralones, Los Ralones,Los Cogollos, Pozo Largo, Pozo Redondo, Ojo de Agua, El Valle, Quebrada Honda, San José, San Isidro et Santa Teresa dans la partie sud de l'état de Falcón, ainsi que dans celles d'Aguada Grande, Bobare, El Jusal, Siquisique, El Sisal, El Copey, El Topeye, La Venta et San Miguel, Archangel des Ayamans dans le nord de l'État de Lara."
Selon Ramón Querales (1995), les Ayamans occupaient un territoire triangulaire qui commençait à Matatere, municipalité d'Irribarén et ses alentours et s'étendaient au-delà de la rivière Tocuyo, au sud de Churuguara et une petite partie de la municipalité de Silva. Aujourd'hui, malheureusement, les communautés paysannes, descendants de ces anciens peuples, luttent entre le sort incertain d'un problème foncier, l'absence d'une politique agraire soutenue et basée sur la production, l'autogestion et l'organisation collective et familiale résistante aux réalités d'une concurrence capitaliste inégale dans notre nation vénézuélienne.
Le rituel susmentionné n'a pas eu lieu consécutivement, ni avant ni après, dans les lieux exactement nommés par Strauss. En ce sens, il y a peut-être eu deux phénomènes parallèles - qui expliquent en partie le dynamisme de Las Turas dans le temps et dans l'espace . Le premier fait référence au fait que ce rite complexe d'extraction ancestrale, qui a été laissé tel quel, a été transformé et maintenu dans certains villages avec plus d'intensité que dans d'autres pour diverses raisons (valable pour l'étude), sautant et faisant face aux siècles, la néocolonisation, l'entrée de nouvelles sectes, religions et autres visions philosophiques, la transculturation et la pauvreté permanente, ainsi que les vestiges ou signes de la modernité, qui ont à peine atteint les périphéries de notre pays.
Le deuxième phénomène qui accompagnait le salut temporel étrange et victorieux de cette danse est la perte, la disparition, la mort ou la réapparition du survivant, changeant une partie importante de sa structure ancestrale fondamentale.
Dans les Cañitos de Santa Cruz de Bucaral, dans la municipalité d'Unión de l'état de Falcón, il réapparaît et se montre avec des figures symboliques - contrairement à la tradition des autorités rituelles masculines indigènes. C'est-à-dire que, dans ce cas, contrairement aux hommes, qui ont été privilégiés pendant des années par leurs cultures ancestrales, les femmes assument maintenant la survie temporaire de cette manifestation culturelle ou folklorique en tant que nouveaux leaders chamaniques.
Dans la zone du Moroturo dans l'état de Lara, des différences importantes et dans certains cas extrêmes peuvent être remarquées, en comparaison entre les danseurs, la préparation et les procédures pour donner un sens à la danse de Las Turas, par rapport au processus suivi par ceux de San Pedro de Maparí dans l'état de Falcón -par exemple-. Il y a des cas tels que la migration de familles de tureras vers d'autres états du pays, l'établissement du rituel de Las Turas à partir de leurs propres différenciations et changements ou de nouvelles reformulations-adaptations, comme dans les zones près de Turén dans l'état Portuguesa.
Quelles que soient leurs différences, leurs survivances ou leurs réapparitions, elles seront toujours, d'une certaine manière, ces belles et mystérieuses possibilités d'élévation et d'illumination comme la danse des esprits, comme signes du surnaturel et du mystère total en mouvement, conduits par des êtres terrestres touchés par la lumière des ancêtres. Les rondes se déplaceront énergiquement au son du tonnerre-pluie comme un maraca primitif, et au son des flûtes - oiseaux sauvages -, et tous à leur tour, devant le centre, le palais sacré, l'arbre de vie comme un arbre abondant de l'au-delà.
Transfiguration et utopie
Les temps changeants vécus par les peuples aborigènes, métis et afrodescendants et les enfants de cultures telles que la culture Ayamán, sont confrontés au passage du temps et à la transfiguration comme un changement fondamental. L'utopie ne manquera pas de faire sonner les voix des ancêtres et des nouveaux dirigeants locaux.
Les peuples devront passer de l'expression rituelle à la réorganisation consciente de leur nouvelle réalité, leur nouveau jour, leur collectivité changeante et émergente, leur affirmation ethnique et le renforcement de leur sens de l'être présent, dansant vers leur avenir, leur demain, leur aube.
Pour paraphraser Leonardo Boff (2000), on peut dire qu'une nouvelle mondialisation et des relations humaines globales devront reconstruire des relations de pouvoir non pas dans la domination, mais dans la mutualité biophile (réciprocité entre les êtres vivants et les peuples), pour continuer à vivre et à grandir pendant encore 10 millions d'années. Il y aura enfin une expérience spirituelle globalisée des énergies nouvelles de l'univers vers la synergie de tous leurs enfants dans des villages de lumière chaude, collective et fraternelle.
traduction carolita d'un extrait de l'article ci-dessous édité en mai 2008 :
Las Turas Venezuela Atlas Etnográfico de Falcón , por Ender Rodríguez
Vida, muerte, mitos, danza y transfiguración. Por Ender Rodríguez " Todo el universo está en proceso de génesis. También la vida... Leonardo Boff, El vuelo del águila. En los misterios del in...
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Selon le docteur Pedro M. Arcaya dans sa publication dans El Aguila un journal de Coro et dans une publication de 1920 de son Histoire de l’état de Falcón, les 5 tribus qui habitaient l’ancienne Curiana étaient les Caquetios, les Ayomanes, les Ajaguas, les Jirajaras et les Ciparigotos ou Chipas.
Le territoire des Ajaguas, des Ayomanes et des Jirajaras correspond aujourd’hui aux districts de Torres et d’Urdaneta dans l’état de Lara et une grande partie de l’état de Falcón.
Jusqu’en 1910, il ne restait qu’un ou deux descendants des tribus anciennes qui possédaient encore le dialecte ancestral.
Le général Octaviano Párraga a pu rassembler un court vocabulaire des indiens de Ssiquisique, des Jirajaras ainsi qu’une copie de l’ayamane comme s’il s’agissait d’un seul dialecte.
En 1916 un jeune compatriote a visité le district d’Urdaneta dans l’état de Lara pendant son mandat de procureur et a recueilli des mots et des noms de famille ayamanes qui complètent le vocabulaire de Párraga. Tout ceci a été rassemblé dans une étude publiée la même année sous le titre Matériaux pour l’étude des dialectes ayamán, Gayón, Jirajara (Materiales para el estudio de los dialectos ayamán, gayón y jirajara.
En 1910 des descendants ont été rencontrés par des personnes en voyage exploratoire dans la région frontalière de Falcón, comprenant deux hommes âgés, une femme et un homme Ayamanes qui connaissaient bien les dialectes et qui ont pu procéder a des rectifications et enrichir le vocabulaire Ayamane.
Sources
http://osomelero.blogspot.fr/2009/07/indigenas-venezolanos.html
Los indigenas del occidente de Venezuela, su historia, ethnografia y afinidades lingüisticas d’Alfredo Jahn.