Paul Robeson, la voix de la dignité humaine
Publié le 1 Février 2016
« Le soleil est à nous. La terre sera nôtre.
Tour de mer, tu chanteras toujours ».
Pablo Neruda
Une personnalité riche de multiples facettes, un militant des droits humains infatigable, afro-américain, fidèle à ses convictions, combattant pour la liberté et d’une grande droiture, son chant porte ses luttes, les luttes, il apportait la lumière dans les foyers et dans les cœurs.
Il est né à Princeton, New Jersey le 9 avril 1898.
Il est décédé le 23 janvier 1976 à l’âge de 77 ans.
Considéré parfois comme polymathe (une personne ayant une connaissance approfondie d’un grand nombre de sujets différents dans le domaine des arts et des sciences ou homme d’esprit universel).
Il sera tour à tour acteur, chanteur, avocat, joueur de football américain et canadien, écrivain, musicien, joueur de basket-ball.
Ses parents
Il est le fils d’un noir marron , William Drew Robeson I qui avait fui une plantation de Caroline du nord et qui avait gagné le nord grâce à une organisation clandestine du nom de « chemin de fer souterrain » . il était devenu par la suite pasteur presbytérien. Le petit Robeson est élevé dans une famille de la petite bourgeoisie intellectuelle afro américaine, il poursuit ses études à l’université avec des principes d’honnêteté morale hérités de son père et surtout une immense soif de liberté.
Sa mère s’appelait Maria Louisa Bustill, c’était une métisse qui descendait d’une famille de quakers à tendance abolitionniste. En 1904, elle meurt dans un incendie quand Paul n’a que 6 ans.
Carrière sportive
Ce très bon athlète a été récompensé à plusieurs reprises et ce dans différents sports : football américain, basketball, course à pied.
Il a fait ses études à l’université Rutgers ou université de l’état du New Jersey qui comprend dans le domaine sportif l’enseignement du basket ball et du football américain.
Après ses études à l’université Rutgers il étudiera à l’université Columbia à New York et à l’école des études orientales et africaines de Londres.
Carrière de chanteur, acteur, musicien
C’est grâce à sa voix de basse qu’il est devenu célèbre. Lisons Pablo Neruda pour en avoir un aperçu :
(...) Alors,
Toi, Paul Robeson,
Tu as chanté.
De nouveau
On entendit sur la terre
La puissante
Voix
De l’eau
Au-dessus du feu,
La solennelle et lente et rauque et pure
Voix de la terre
Nous rappelant
Que toujours
Nous étions des hommes,
Que nous partagions
Le deuil et l’espérance (...)
Pablo Neruda
Sa voix le rend célèbre aussi bien dans la chanson que dans le rôle d’acteur.
Son succès est international de sorte que les autorités coloniales craignent son influence sur les populations colonisées car il suscitait l’enthousiasme du public.
Sa carrière d’acteur se déroule surtout entre 1925 et 1942. Il va jouer dans onze films britanniques presque essentiellement :
- Body and soul 1924
- Camille 1926
- Borderline 1930
- The emperor Jones 1933
- Sanders of the rives 1935
- Show boat 1936
- Song of fire 1936
- Big Fella 1937
- Les mines du roi Salomon 1937
- Jericho 1937
- The proud valley 1940
- Native land 1942
- Tales of Manhattan 1942
Il est le premier noir à jouer le rôle d’Othello .
Sa voix de basse sera mise au service de chansons diverses, negro spirituals, chansons folkloriques américaines, irlandaises, russes, yiddish, chansons de comédies musicales. Il n’aborde cependant pas le blues.
Il étudie à Londres l’histoire et les cultures du continent africain et il parlera jusqu’à une vingtaine de langues africaines dont une dizaine couramment.
image Manifestation contre les lois de la ségrégation à la Maison blanche en 1948
Le militant
Sa carrière d’avocat aux Etats-Unis est vouée à la défense des victimes de l’esclavage. Il est l’un des premiers à dénoncer l’apartheid en Afrique du sud.
Il défend très largement les opprimés et pas seulement les afro descendants, son humanisme est international.
« Non,
Paul Robeson,
Toi,
Auprès
De Lincoln
Tu chantais,
Couvrant
Tout le ciel de ta voix sacrée,
Pas seulement
Pour des Noirs,
Pour les pauvres Noirs,
Mais aussi pour les pauvres
Blancs,
Pour
Les pauvres Indiens,
Pour tous
Les peuples (...)
Pablo Neruda
Il est proche des idées communistes (je ne sais pas au juste s’il était encarté au PC alors). Le PC américain et le Labour defense sont à cette époque les seuls partis à lutter contre les discriminations et contre le racisme.
Aux EU il sera une des victimes du Maccarthysme.
Il militera sans cesse et pas uniquement pour les droits et la justice des noirs d’Amérique, il fait partie des Brigades internationales américaines et militera et chantera pour la république espagnole, il défend les Aborigènes d’Australie, les Maoris, il est contre l’apartheid en Afrique du sud.
Son militantisme basé sur l'humanisme est internationaliste comme il devrait toujours l'être. En cela il était un homme de son temps et en cela il était un homme, un militant avant-gardiste, porteur de ces idéaux purs et désintéressés que chacun des militants que nous sommes doit avoir à l'esprit et au coeur pour mener à bien un combat contre les injustices, pour la dignité des peuples, contre la misère et l'exploitation, pour l'égalité,contre les ségrégations, pour la liberté.
Robeson chante pour les troupes républicaines près du
champ de bataille de Teruel en Espagne.image
image Accueil reçu en Union soviétique en juin 1960
Il apporte sa sympathie aux pays du monde qui sont socialistes ce qui lui sera vivement reproché dans son pays . Il voyait dans les pays socialistes, dans le socialisme d’alors, un rejet du racisme et les promesses d’un monde meilleur.
Il aura comme nombre de militants communistes dans le monde, la même réaction face à la dénonciation des crimes du stalinisme, pensant que dénoncer ces crimes revenait au même que participer aux campagnes de calomnies de la droite contre le socialisme.
"The House I Live In" (Paul Robeson)
The original lyrics to this powerful song...Bass Paul Robeson at his best. THE HOUSE I LIVE IN (1947) What is America to me? A name, a map or a flag I see, A certain word, "Democracy", What is ...
https://www.youtube.com/watch?time_continue=85&v=U3syulBjkng
Aux Etats-Unis, il passe pour un traître en raison de son amitié pour l’URSS et la Chine. On tente de l’empêcher de critiquer la politique américaine à l’étranger, on lui interdit de quitter le pays et on lui retire son passeport de 1950 à 1958. Il subira un boycott presque intégral qui sera rompu par les syndicats américains et canadiens qui organiseront un concert de soutien à la frontière des deux pays réunissant 20 à 40.000 personnes.
En 1949, un de ses concerts à Peekskill au nord de New York suscite de violents affrontements dus à des sympathisants du KKK qui voulaient empêcher le concert et qui reçurent le soutien de la police.
En 1957, il souhaite se rendre au pays de Galles pour y soutenir la lutte des mineurs et comme il en est interdit, il enregistre à NY un concert qui sera retransmis via une liaison téléphonique à 5000 personnes.
En 1959 et en 1960 il se produit à la fête de l’humanité en France et il est accueillit avec enthousiasme.
«C'est vous qui êtes anti-américains et
vous devriez avoir honte»
- Paul Robeson devant la Commission de la Chambre sur
les activités anti- américaines (HUAC), le 12 juin 1956 -
En 1966 après une tournée à l’étranger avec son épouse alors qu’ils avaient récupéré leurs passeports, il rentre à NY où y décède Eslanda des suites d’un cancer.
Ils s’étaient mariés dans les années 20. Eslanda Cardoso Goode était biologiste au presbytère hospital de NY.
Paul finira le reste de ses jours à Harlem , il sera souvent hospitalisé. Il vivra dans la misère, isolé, pauvre mais riche des lettres de ses fans du monde entier.
Il décédera à l’âge de 77 ans d’un arrêt cardiaque faisant suite à deux infarctus antérieurs.
sources : wikipédia, lib54 wordpress
(…) la cascade a déchaîné
Son tonnerre inépuisable
Sur ton cœur, comme si un fleuve
Tombait sur une roche
Et que la pierre chantât
Par la bouche
De tous ceux qui se taisent,
Au point que tout et tous
En ta voix
Élevèrent
Vers la lumière leur sang
Et que terre et ciel, feu et ombre et eau,
Montèrent avec ton chant (..)
Pablo Neruda