« Etre indigène c’est avoir un univers et ne pas y renoncer » – La fibre du ceiba

Publié le 24 Février 2016

Je sais parler oiseau
Le langage des oiseaux
Quand ils demandent chaque matin :
« Vas-tu bien ? »
Prennent dans leur bec
Une graine, un ver, un fruit
Une fibre du ceiba
Pour en tapisser le nid
Des espérances.

Je sais parler ruisseau
Le langage des ruisseaux
Quand leur lit bouillonne d’énergie
Quand il épouse chaque pierre
Quand il irrigue de ses mots fous
La fleur de l’eau au ras de l’eau
La fleur de vie gorgée de vie.
La fibre du ceiba plonge au cœur du ruisseau
Sa racine profonde
Son kilomètre de réseau
Son tronc se gorge de minéralité
Sa gorge est si engorgée
Qu’une excroissance expurge peu à peu
Son propos.

Je sais parler jaguar
Le langage du jaguar
Son feulement précis
Sa rauque colère
Et sa chaude reconnaissance
Quand dans sa gueule toute peine confondue
Se tient un chaton tout vibrant et tout chaud
La vie reprend ses droits
La maternité est une nécessité
Elle protège défend nourrit
Caresse cache parfois punit
Elle puise dans la fibre du ceiba
Un ferment chaud et fécond.

Je sais parler nuage
Le langage des nuages
Ce morse profond éduqué par les millénaires
Le nuage lui
Sait parler la chanson de la pluie
La chanson des tempêtes des grêles riches en oranges
Il sait parler le chant qui se presse
Pour irriguer la terre
De sa bienfaisante donation.
Le nuage assoit son mouchoir de tendresse
Sur la feuille-caresse du ceiba attristé.

Je sais parler aurore
Et puis soleil au trouble obscur du tournesol
Je sais chanter le colibri
Et son petit nombril infini
Je sais rimer ayahuasca
Fibre d’espace-temps hors du corps
Juste pour un moment (fibre de la mémoire)
Je sais parler tapir
Tapi en catimini dans un buisson ravi
Je sais chanter cascade
Non la maussade la cassonade de ma douche évoluée
Je sais parler nature
Dans la fibre du ceiba
J’ai troqué mon prénom
Pour sa tendre oraison
Et dans son pied d’éléphant généreux
Je tape comme sur le tambour
Les mille chansons d’amour
D’un peuple à son environnement.

***///****

« Etre indigène c’est avoir un univers et ne pas y renoncer »
Alors je suis indigène
Et toi aussi
Et toi encore
Chacun son univers
Arbre, nuage, animal ou nature environnante
Chacun son univers
Dans sa tête ou dans sa fibre
Se tient une matière grise
Qui dit :
Rappelle-toi d’où tu viens
Graine d’un fruit de vie
La matière première est un écrin
Qu’il ne faut jamais oublier
La graine pousse
Et son étui
Tombe tout près d’elle
Comme une petite coquille
Qu’un jour
Il faudra refermer sur la nuit
Qu’un jour il faudra remettre
Aux étoiles
Habillée de la fibre du ceiba
Seul à connaître
Le mystère de l' inconnu.

Carole Radureau (24/02/2016)

« Etre indigène c’est avoir un univers et ne pas y renoncer » – La fibre du ceiba

Poème inspiré par un magnifique texte traduit que j'ai trouvé sur fb via le soutien au Brésil indigène. Je mets le lien mais je ne sais pas si ceux qui ne vont pas sur fb pourront en prendre connaissance. Cette traduction a été faite sur fb, hélas mais elle est si belle que je ne pouvais pas la laisser de côté.

L'arbre, un fromager qui est nommé en langage indigène dans ce texte samáuma est un ceiba, nom donné par les mayas en Amérique centrale. Samáuma est le nom de sa fibre, j'ai choisi délibérément de parler de ceiba car c'est ainsi que l'on connaît le mieux cet arbre ICI par exemple pour en savoir plus sur ce blog.

Rédigé par caroleone

Publié dans #Mes anar-poèmes, #indigènes et indiens, #Les arbres

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M
Bonsoir Carole, un ami Google+, Stéphane, m'a offert le lien de votre poème.<br /> Je viens de le lire puis de le relire afin d'en respirer le moindre souffle de vos mots.<br /> Vous avez dit en mots poètes légers ou profonds la magnifique pensée - transmission de l'esprit indigène.<br /> Merci sincèrement,<br /> Acceptez-vous que je le dépose sur ma page Google+ ? en y apposant votre nom et celui de votre blog !<br /> Belle, très belle continuation à Vous Carole,,,<br /> Marie
C
Ce que vous me dites, Marie me va droit au cœur car c'est exactement ce que je voulais transmettre avec ce texte inspiré par les indigènes. Je sais que la poésie et leur pensée sont intimement liées et quand je peux coucher ceci en poésie, je le fais. Oui bien sûr, vous pouvez éditer et diffuser ce poème, il est libre de droit même si je ne mets plus en-dessous de chacun la licence que j'ai prise.<br /> Belle journée et merci de votre visite.<br /> caro