Bangladesh : Les Jummas

Publié le 25 Septembre 2015

 

 

 

 

 

 

 

Chakma, Bangladesh © Mark McEvoy/Survival

 

Ils sont les premiers habitants des Chittagong Hills Tract, une région montagneuse et accidentée du Bangladesh dans la division de Chittagong. Au nord, la région est bordée par l'Inde et à l'est par la Birmanie.

Cette région de montagnes contraste avec le reste du pays plutôt plat. Il y pousse de nombreuses espèces de fruits et des bambous. On y trouve des ressources naturelles intéressantes comme le bois et le gaz naturel.

Des explorations pétrolières y sont menées.

Les peuples qui vivent dans les Chittagong Hill Tracts sont officiellement reconnus depuis 1997. Il y a 11ethnies qui se sont vu attribué les nom collectif de Jumma.

Tous les groupes à part les Chakma sont de langue tibéto-birmanes. Les origines des locuteurs des langues tibéto-birmanes se situent dans l'actuelle Chine. Ils sont descendus par des migrations successives à leurs lieux actuels.

La plupart sont bouddhistes d'autres son hindouistes.

Les bouddhistes fêtent Biju, le nouvel an bouddhiste. Un festival est organisé également en novembre, le Kotin Gibor Dan.

Le nom Jumma vient d'une pratique qui se nomme jum et qui correspond à l'essartage (le brulis des terres).

Leurs moyens de subsistances sont la forêt et l'agriculture sur brûlis, la chasse, la pêche et la riziculture dans les vallées.

L'agriculture sur brûlis

On ne peut la qualifier d'itinérante que pour quelques peuples dont les Garos qui construisent un "borang", une maison des champs de structure légère, dans un arbre à portée des bêtes sauvages pour s"occuper de leurs cultures une partie de l'année. Ceci est une sorte de résidence secondaire, légère.

La mousson terminée en octobre, les villageois s'entendent pour déterminer l'espace qui sera à travailler. Les arbres sont coupés en novembre. La coupe reste au sol pour sécher les trois mois d'hiver. En février on prépare le terrain qui sera brûlé en mars. Les cendres agissent alors en temps que fertilisant du sol et comme celui-ci va recevoir quelques pluies en mars-avril, cela facilitera les semailles.

Les cultures sont céréalières, riz non irrigué, millet et maïs. Il y a aussi des calebasses, des oignons et du manioc ainsi que du coton. Les récoltes se font le second semestre de l'année, sauf pour le coton qui est plus tardif.

 

Bandarban1 ». Sous licence CC BY-SA 2.5 via Wikimedia Commons.

Bandarban1 ». Sous licence CC BY-SA 2.5 via Wikimedia Commons.

Bandarban1 ». Sous licence CC BY-SA 2.5 via Wikimedia Commons.

Kaptai Dam 1965" by Govt. Official - Kaptai Power Plant Archive. Licensed under CC BY 2.5 via Commons.">"lank" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Kaptai_Dam_1965.jpg#/media/File:Kaptai_Dam_1965.jpg">Kaptai Dam 1965" by Govt. Official - Kaptai Power Plant Archive. Licensed under CC BY 2.5 via Commons.

Histoire

L'histoire de la région est inconnue jusqu'au XVIe siècle.

Les Chakma auraient migré de l'Inde jusqu'en Birmanie dans la région de l'Arakan.

Chassés par les arakanais, ils s'installent dans les Chittagong Hills Tract au cours du XVIIe siècle.

Au XIX e siècle c'est la colonisation par le royaume d'Angleterre.

La région devient propriété de l'empire britannique qui donne une grande autonomie aux tribus de la région sous la direction de leurs chefs.

En 1946, les britanniques à cause des heurts sanglants entre différentes communautés crée deux états indépendants, l'Inde et le Pakistan. Le Pakistan est divisé aussitôt en régions distantes de 1700 kilomètres, le Pakistan oriental (qui deviendra le Bangladesh en 1971) et le Pakistan occidental.

Déplacements massifs des populations. Des millions de musulmans indiens partent au Pakistan, des hindous du Penjab iront en Inde.

En 1947, le tracé des frontières est officialisé : les populations autochtones des Chittagong Hills Tract qui pensaient être rattachés à l'état indien découvrent qu'ils sont rattachés au Pakistan ce qui provoque une série de protestations. L'armée intervient pour rétablir l'ordre et imposer le drapeau pakistanais. Les Chittagong Hills Tract sont englobés dans le Pakistan oriental.

Les problèmes continuent dans la région avec la construction du barrage de Kaptai qui dure de 1957 à 1963. La région était alors encore territoire pakistanais. 25.000 hectares appartenant aux Chakma sont inondés par le projet hydroélectrique, 10.000 personnes perdent leur habitat et 40.000 autres se réfugient en Inde.

A cette période, le gouvernement pakistanais organise une campagne pour promouvoir la région et y encourage les familles bengalies à s'y installer.

 

 

 

 

 

 

By Biplob Rahman - Own work, CC BY 2.5, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=3988883

 

En 1972, une délégation de peuples autochtones dépose au premier ministre une liste de revendications qui seront rejetées ( autonomie des Chittagong Hill Tract, retour à la législation de 1900 par le gouvernement local, maintien du rôle des chefs traditionnels, interdiction de l'installation des populations étrangères à la région). Est crée la même année la Parbattya Jana Sambati Samiti, PCJSS , une association de solidarité populaire des Chittagong Hills Tracts qui possède son bras armé, la Shanti Bahini.

Dans les années 70, le bras armé attaque les forces militaires et paramilitaires installées sur le territoire et il attaque aussi les colons bengalis (des centaines de morts). Il procèdent également à des enlèvements de ressortissants étrangers contre des rançons.

Des opérations militaires d'envergure viendront en représailles en 1980. Massacre de dizaines de villageois, les colons bengalis s'en prennent aux autochtones, sans doute à l'instigation de l'armée. Formation de groupes armés Village defence parties. Il y aurait eu plus de 8500 morts durant ce conflit de deux décennies dont 2500 civils.

Un accord de paix est signé le 2 décembre 1997 avec la création d'un Chittagong Hills tract regional council constitué par les conseils locaux des trois districts. Le conseil a 22 membres nommés pour 5 ans. Le président doit être un autochtone, il a les statuts d'un ministre d'état.

14 membres du conseil régional, 12 hommes et 2 femmes sont élus parmi les populations autochtones. Le conseil régional a pour tâche la coordination du développement des 3 districts, leur administration, le maintien de l'ordre, les activités des ONG, la gestion des catastrophes, des programmes d'aide.

Mais le traité n'est pas appliqué et les gouvernement du Bangladesh mène toujours une politique de répression contre les Jumma. Les bengalis maitrisent l'économie, ils sont souvent des officiers de l'armée.

Une famille chakma des Chittagong Hill Tracts, au Bangladesh. Les tribus de cette région vivent sous la menace constante des colons et de l'armée du Bangladesh. Les assassinats, tortures et viols y sont monnaie courante.

© Mark McEvoy/Survival

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Les viols de femmes et jeunes filles toujours impunis

Les colons, selon les militants sur place, violent en toute impunité les femmes et les jeunes filles Jumma.

En 2014, 117 femmes autochtones dont 57% étaient des enfants ont été victimes d'abus sexuels et d'attaques physiques.

21 furent violées en réunion, 7 tuées après le viol, 55 physiquement agressées, 21 victimes d'une tentative de viol, 11 kidnappées ou victimes d'en tentative de kidnapping. Les chiffres augmentent d'année en année. Bien souvent les familles connaissent les agresseurs et ne portent pas plainte.

L'augmentation de l'armée dans la région ne fait qu'aggraver les choses.

C’est malheureusement typique de la façon dont les femmes autochtones sont traitées dans toute l’Asie du sud-est. Dans l’Inde voisine plus de 100 millions d’autochtones sont mal traités parce qu’ils sont au-dessous du système des castes qui encourage, dans toute l’Asie du sud-est, un sentiment de supériorité et de pouvoir sur les femmes autochtones. Mais dans les Chittagong Hill Tracts ces faits sont dissimulés et l’impunité totale des coupables crée un problème encore plus grave.

La militarisation

Cette militarisation excessive est source de violences pour les Jummas sur leur territoire. L'armée bangladaise est positionné dans la région des Chittagong Hills tract qui ne représente pourtant que 10% de la superficie du pays et 1% de la population. IGWIA en 2012 estimait qu'il y avait un soldat pour 40 civils dans cette région alors qu'il y a un soldat pour 1.750 civils dans le reste du pays.

Privés de leurs terres progressivement, soumis à la persécution permanente de l'armée et des pressions exercées par les colons, les Jummas voient leurs activités traditionnelles de pâturage, élevage, cueillette fortement affectés.

Bawm Children, Kewkradong Hill, 2007 by Biplob Rahman » par Biplob Rahaman. Sous licence CC BY 3.0 via Wikimedia Commons.

Les peuples

Les BAWM

Bangladesh : 5800 (1981)

Inde : 4400 (2004)

Birmanie état Chin : 3660 (2000)

Langue tibéto-birmane groupe dit kuki-chin-naga.

La majorité des Bawn a été christianisé depuis 1918.

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image

Les CHAK

Bangladesh : 5500 (2002)

Birmanie , chaîne de l'Arakan : 25.000 personnes

Langue non classée dans une famille connue.

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বাংলাদেশের 'চাকমা' নামক উপজাতি গোষ্ঠীর একটি কিশোরী মেয়ের চেহারা এবং পোশাক » par Mohammad Rafi Saad — Travail personnel. Sous licence CC BY-SA 4.0 via Wikimedia Commons.

 

 

Les CHAKMA

Autodésignation : changma

Population totale estimée pour l'ethnie : 3 millions de personnes au Bangladesh, en Inde et en Birmanie.

Les chiffres donnés par le gouvernement central sont inférieurs afin de permettre de mener une politique de colonisation de la région. J'ai pris le parti de retenir les chiffres donnés par le peuple.

Leur système social traditionnel est sous l'autorité d'un roi.

Les guthi sont les premiers clans des Chakma issus du regroupement historique autour des chefs de village ou de territoire dont les villageois ont pris le nom pour exprimer leur appartenance.

La population augmentant, les guthis se sont divisés en gojas. Ce sont les grandes branches des noms de famille de la société Chakma (= de 50 grandes familles, Tunya goja, Bung goja, Larna goja etc...)

Langue : changma kodha groupe bengali-assamais de la famille des langues indo-aryennes.

religion : bouddhiste

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Khumi Girl 1 » par Mridul Sangma — Travail personnel. Sous licence Domaine public via Wikimedia Commons.

 

Les KHUMI

Bangladesh : 1214

Birmanie : 120.000

Langue : tibeto-birmane, kuki-chin-naga

Religion : animiste

Les hommes ont les cheveux longs avec une touffe sur la tête.

Ils vivent de la culture itinérante.

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DSC0216 Burma Chin Village near Lemro River Pretty little girl (7374973732) » par DANIEL JULIE from Paris, France — DSC0216/Burma/Chin Village near Lemro River/Pretty little girlUploaded by russavia. Sous licence CC BY 2.0 via Wikimedia Commons.

Les KHYANG

Ou Chin

1.5 millions de personnes

4 groupes de Khyang au nord, centre, et sud de l'état Chin et un groupe ancien kuki à l'ouest de l'état.

Langues khyang du groupe dit kuki-chin-naga de la branche tibéto-birmane.

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Lushai girl with traditional dress Photo: Amiya K Chakma

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Les LUSAI

Ou Lushai Lushei.

Langue lusai du groupe tibéto-birman : kuki-chin-naga

Une des 11 tribus du groupe ethnique Mizo.

Religion chrétienne.

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Rakhine Thingyan 2011 » par Htoo Tay Zar — Travail personnel. Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.

 

 

Les MARMA

Ou Arakanais

Bangladesh : 200.000 (2001) nom Marma

Birmanie état d'Arakan : 2.744.000 (2000)

Inde états de l'Assam, de Tripura, de Mizoram de Bengale occidental : 24.000 . Nom : Mog

Langue : arakanaise du groupe dit lolo-birman, branche tibéto-birmane

Religion : bouddhiste et religion traditionnelle.

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Ploong » par Astrothomas — Travail personnel. Sous licence CC BY 3.0 via Wikimedia Commons.

Les MRU

Ou Mro, Murung.

Bangladesh : 80.000 (2002)

Inde, Bengale occidental : 1200 (1981)

Leurs voisins les nommaient Lengta, Kuki ou Langye.

Ils auraient été chassés de l'Arakan par les Khumi dont ils sont proches ethniquement parlant et se seraient installés dans la vallée occidentale de la Sangu et le long du Matamhuri.

Langue : mru du groupe de la branche tibéto-birmane

Religion : bouddhiste et religion traditionnelle.

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Les PANKHU

Ou Pankho, Pangkhua, Pang.

Bangladesh : 2300 (1981)

Birmanie état Chin, chiffre ?

Inde état du Mizoram : 200 (1971)

Langue : panhu du groupe dit kuki-chin-naga de la branche tibéto-birmane.

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GARO TRADITIONAL DRESS-9 » par Vishma thapa — Travail personnel. Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.

Les TRIPURA ou GARO

Bangladesh : 102.000

Inde, états du Meghalaya, Assam, Bengale occidental, Nagaland, Tripura : 575.000

Nommés Tripura au Bengladesh.

Langue : garo

Société matrilinéaire.

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Tanchangya people are harvesting » par Priyo — During Tanchangya people harvesting in the estate farming.. Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.

Les TENCHUNGYA

Bangladesh : 51.773 (2012)

Birmanie : 40.000

Inde : 10.000

Langues tangchangya et khora

Une pétition est actuellement en ligne pour aider les Jummas :

http://peaceforjummas.wesign.it/fr

Sources : wikipédia, survival, GITPA

Rédigé par caroleone

Publié dans #Jummas, #Bangladesh, #Peuples originaires

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A
En te lisant je me demandais s'il existe sur terre un seul peuple qui ait été épargné par les volontés colonisatrices. Parce que tout ce dont ils souffrent encore aujourd'hui ce sont des conséquences de cela. Ton article est très intéressant, sur des peuples que nous connaissons très peu, merci Caro
C
Après un petit tour de piste depuis 7 ou 8 ans que j'écris sur les peuples, et même si je n'ai pas encore parlé de chaque pays où vivent encore des peuples autochtones, je peux te dire que non. Dans de très rares cas, des peuples ont réussi à gagner une réelle autonomie, je pense aux Kunas du Panama. Mais même pour ceux qui ont leurs terres démarquées et des réserves attribuées, tu vois bien comme cela n'empêche pas les bûcherons et les compagnies minières ou hydroélectriques de s'installer avec la complicité des états. Ceci est une autre forme de colonisation, c'est la colonisation moderne avec les mêmes procédés pour faire déguerpir les peuples. Cela faisait longtemps que je devais parler des Jummas, je m'y suis mise hier en fin d'après-midi et j'ai bouclé ça ce matin. Je donne parfois des priorités ainsi, parce que cela m'arrive de rester en rade sur certains peuples dont j'ai commencé les articles. Ce n'est pas si évident que cela à faire même s'il y a un peu de source car il faut rentrer rapidement dans la situation du peuple pour se l'approprier afin d'en rendre un résumé fiable même s'il est succinct. Quand je parle des peuples dont j'ai l'habitude de parler, comme je commence à mieux les connaître, c'est plus facile et parfois je privilégie la facilité. Je dois dire pour être sincère que je ne me suis pas donnée à fond sur les peuples d'Asie. Mais ceux dont j'ai déjà parlé, je les ai adoptés et avec les Jummas, ça va être ainsi. J'ai cette impression très nette de retrouver des bases communes à de nombreux peuples comme s'ils étaient frères ou cousins. Je regrette seulement de ne pas avoir trouvé plus de détails pour chaque ethnie, il y en a une en particulier qu'il m'aurait plu de détailler ce sont les Garo, une société matrilinéaire qui fait partie des Jummas.