Un pas de côté - Elections départementales du 22 mars (canton de Revel)
Publié le 3 Février 2015
Une alternative ?
Une expérience à renouveler ?
Voter ou ne pas voter, là est la question que chacun des électeurs consciencieux se pose.
Mon oncle h. m'envoie ses réflexions et vous trouverez en lien ci-dessous l'initiative prévue.
L'oncle h. observe ou invente, quand il ne fait pas les deux à la fois...
Élire, encore élire, et pourtant demeurer hors du coup ?
Dans la ville où je suis en train de rédiger ces souvenirs, je dois assister tout à l’heure à une rencontre avec un groupe qui dit avoir entrepris de préparer de manière très inhabituelle de prochaines élections. « Élire, encore élire, et pourtant demeurer hors du coup ? Il y a quelque chose qui cloche ! », y énonce-t-on.
Pour ma part, je ne délègue jamais ma voix à qui prétendrait la mériter sans avoir de comptes à rendre et sans accepter d’être remis en cause en cours de mandat. Tout juste me voit-on dans un bureau de vote lorsqu’il m’est demandé de me prononcer sur quelque chose de précis. C’est ainsi que j’eus la joie de contribuer, en 2002, à l’échec - certes tout temporaire ! - du projet de constitution européenne. Joie, parce que se rendirent exceptionnellement visibles à cette occasion les deux camps en présence en France : la coalition du BEM (business, état, médias) d’une part, le peuple - ô combien bariolé ! - d’autre part.
Qu’un groupe prétende avoir inventé comment rendre démocratique une élection aux résultats confisqués d‘avance, voilà qui ne laisse pas de m’intriguer !
Chaque élection est un coup porté à la démocratie.
- Chaque élection est un coup porté à la démocratie.
Bizarre ! C’est mon interlocutrice, V., qui s’exprime ainsi alors qu’elle appartient à un groupe en train de préparer ...les prochaines élections par scrutin de liste.
- Faut que tu m’expliques !
- L’on constate, me dit-elle, que la proportion d’abstentionnistes - de grévistes, serait-il plus juste de dire - croît. L’on sait aussi que, parmi eux, un tiers au moins exprime en s’abstenant un point de vue critique sur la pratique même de l’élection comme elle nous est présentée comme naturelle. L’on sait, enfin, que si parmi ceux qui s’expriment un bon nombre ne s’abstient pas c’est pour des raisons connues : peur du qu’en dira-t-on, argument-massue du ‘il y a des pays où les gens n’ont même pas le droit de vote’, etc.
Notre petit groupe s’est constitué de gens qui se demandaient comment regonfler la démocratie à partir de ce phénomène. Et nous en sommes venus à ceci : présenter des abstentionnistes comme candidats aux élections de l’an prochain.
- Pour le moins paradoxal ! Tout de même, si ‘chaque élection est un coup porté à la démocratie’, comme tu l’affirmes, je ne vois pas ce que vous allez y changer !
- Les candidats se présentent habituellement comme des conquérants faisant valoir un quasi-droit, quand ils ne s’estiment pas tout simplement propriétaires d’une part du cheptel des électeurs. L’idée n’est évidemment pas de singer ce comportement. Un candidat devrait être modeste, s’interdire de placer de soi-disant réponses avant les questions, rendre des comptes, se savoir révocable en cours de mandat, et surtout, selon nous, se considérer comme un véritable porte-parole d’autres actions démocratiques bien ancrées dans le paysage politique (et pas seulement d’intérêts individuels ou de lobbies de couloirs), etc. C’est surtout ce dernier point qui nous guide.
- Bien abstrait, tout ça ! De quels types d’actions démocratiques parles-tu ?
- Il n’en existe pas de tout faits. Nous devons donc en inventer, en même temps que se préparent ces candidatures. Elles seront, en fait, comme le recto et le verso d’une même démarche. Chaque écolier sait que, voilà deux siècles, eurent lieu en France ce qui se nomma "Cahiers de doléances". Ce fut une vaste opération de communication avant d'être opération de revendication : il s'agissait avant tout pour les doléants d'exposer au souverain la situation concrète de son royaume. Par la même occasion, l’information circula entre eux, les doléants. Or, deux cents ans plus tard, le nouveau souverain - le peuple - peine encore à être informé ! Des résultats de douteux sondages via des médias toxiques sont loin de faire l'affaire. Et s'il existe des commissions d'enquête et ce genre de choses bénies d’en haut, elles sont loin d'être à la hauteur. Ce qui fait défaut, c'est un acte collectif d'auto-information publique du souverain, autrement dit de nous autres. C’est pourquoi nous voulons expérimenter une opération cousine des cahiers de doléances. Ca s‘appellera ‘Nous autres‘.
Devant ma perplexité, P. prend la relève.
- V. est une intello, que veux-tu ! Elle n’a pas encore appris à dire les choses simplement... Avec elle, c’est tout de suite les grands mots...
- Bon, alors, s’il te plaît, P., donne-moi une chance de comprendre comment ça se passerait concrètement.
- Nous avons un an pour préparer un grand remue-méninges. Disons que ce sera le recto dont parlait V. L’objectif est de concerner le plus possible des personnes qui s’abstiennent d’ordinaire ; mais bien sûr, les autres aussi seront concernées ! Parmi elles, nous souhaitons qu’un millier, au bas mot, mette chacun, noir sur blanc, une interrogation ou une formulation qui n’a pas cours dans le jeu politique habituel. Exemples : « La crise ? Quelles crises ? ». Ou « Quid de l’autorité ? et des autorités ? ». Ou « A quoi servent les médias ? », « Que mangerons-nous demain ? ». Etc. Ces interrogations constitueront une sorte de badge personnel de chacun/e, laquelle aura pour tâche de garder ouvert le débat sur cette question. Durant la période qui nous sépare des élections, et ne serait-ce que durant tout le mandat qui en résultera. Modestement, mais par tous les moyens possibles. En privilégiant les interrogations.
- Mais pourquoi diable lier une telle initiative à une élection ?
- Nous sommes convaincus que, si nous opérons sans lien avec un événement officiel, notre entreprise n’aura ni l’ampleur ni l’impact qu’elle devrait avoir. Le mieux, c’est de parasiter un scrutin de liste.
- Et un millier d’abstentionnistes constituera donc une liste pour se présenter à ces élections ?
- Un tirage au sort, probablement, désignera parmi les volontaires un petit nombre de ‘candidats’. Ce sera le verso de l’opération.
- Et s’ils sont élus ?
- Nous n’en sommes pas là. Il ne s’agit pas d’appliquer un plan tout fait. ‘Nous autres’ ne se préoccupe pour le moment que du démarrage. Et ça n’est pas un petit chantier !
L'oncle h. observe ou invente, quand il ne fait pas les deux à la fois...
Un pas de côté dans le canton de Revel
pour communiquer notre envie de faire évoluer notre organisation sociale vers la démocratie, et pour se compter, se rencontrer, discuter, agir ensemble, entre personnes qui partagent cette envie ...