Nous ne laisserons jamais Mumia seul

Publié le 8 Mai 2014

Nous ne laisserons jamais Mumia seul

Lettre ouverte du MJCF à Madame Geneviève Girard, maire de Porte-lès-Valence

Ce 24 avril est un triste jour pour la justice. Mumia Abu-Jamal fête ses soixante ans dont trente-deux passés derrière les barreaux, soit 10 694 jours ! Ce militant infatigable des droits civiques, des minorités opprimées aux Etats-Unis, croupit dans les geôles américaines après trente ans d’acharnement judiciaire contre lui. En effet, accusé du meurtre d’un agent de police en 1981, il n’a jamais pu bénéficier d’un procès équitable. C’est la raison pour laquelle des militants progressistes de par le monde ont fait de Mumia un symbole.

Le symbole de la lutte contre l’arbitraire alors que de nombreux témoins se sont rétractés après de fausses déclarations et que tout pousse à établir un nouveau procès. Le symbole de la lutte contre la peine de mort car il a fallu combattre avec acharnement jusqu’en 2011 pour que Mumia échappe à la sentence infâme de l'éxecution. Depuis, sa peine a été commuée en peine de prison à vie. Le symbole de l’oppression raciale et de classe face à un combattant de la justice pour les Afro-américains et l’ensemble des classes populaires parquées dans des conditions indignes dans les grandes métropoles étatsuniennes.

Au cours de sa carrière de journaliste, il a toujours voulu relater ce quotidien difficile et donner la parole aux sans-voix. Il fût poursuivi avec acharnement par le juge Sabo et des agents de police, membres de l’Ordre fraternel de la police, qui ont voulu « griller le nègre ».Au pays du président Barack Obama, la discrimination raciale reste une puissante réalité : la moitié des prisonniers sont afro-américains et 70% des jeunes condamnés sont issus de cette communauté. L’incarcération massive des minorités et des plus faibles constitue la réponse d’un système étatsunien qui frappe plutôt que d’aider, d’un pays qui n’en a pas fini avec son passé esclavagiste et raciste.

C’est pour cette raison que le Mouvement jeunes communistes de France a bataillé des années durant pour un procès juste, pour le refus de la peine capitale envers Mumia. Dans le cadre de la campagne internationale, nous avons sensibilisé, avec des associations de défense des droits humains, des milliers de jeunes en France. Nous avons repris la force de Mumia, ce qu’il savait si bien faire : faire entendre sa voix, celle d’un prisonnier politique qui gênait trop, celle d’un homme à qui on a refusé entre 1982 et 2011 de pouvoir serrer dans ses bras sa femme et ses enfants.

Nous avons obtenu qu’il quitte le couloir de la mort, que son nom soit toujours apposé à celui de justice. Des municipalités ont eu le courage de lui faire honneur en le gratifiant de la citoyenneté d’honneur, du nom d’une place, d’une rue à Paris, Bobigny, Villejuif, Malokoff, et bien d’autres villes. Parmi celles-ci, il y a Porte-lès-Valence. C’est l’ancien maire Pierre Trapier qui a élevé en 2008 Mumia Abu-Jamal au rang de citoyen d’honneur. Mais la récente élection municipale et le changement de majorité politique dans cette ville de la Drôme bouleversent la donne. Mme la maire Geneviève Girard, nouvellement élue en qualité de première magistrate de la ville, vous avez fait retiré le portrait de ce prisonnier politique de l’Hôtel de Ville. Nous regrettons un tel geste d’autant plus que nous venons d’apprendre l’annulation d’une initiative autour de la situation en Palestine dans votre commune au motif de « trouble à l’ordre public ».

Ces décisions, parmi les premières de votre majorité, ouvrent un dangereux précédent. Celle de revenir sur des combats citoyens pour la justice et la solidarité internationale. Celle de l’acceptation de la fatalité alors que la crise actuelle doit nous pousser au courage politique.

Que se passe-t-il si demain d’autres villes décident de nier l’injustice, de ne plus prendre des positions qui interpellent, qui ouvrent le débat sur le rôle de notre pays? Ces combats internationaux interrogent ce que nous voulons faire ici, ils élèvent le débat avec tous nos concitoyens. Ils permettent aux plus jeunes d’entre nous de comprendre le monde, d’interroger leur rôle pour le changer. A l’heure de l’abstention massive, ce n’est pas une mince affaire mais un défi politique majeur.

Rappelons l’utilité de ces parrainages, des actions citoyennes : que ce serait-il passé sans une intervention internationale pour condamner l’apartheid, pour dénoncer le sort de Nelson Mandela et de tant d’autres ? Que ce serait-il passé si des municipalités, des organisations n’avaient pas combattu le sort fait à Salah Hamouri, jeune franco-palestinien emprisonné injustement pendant sept ans ? Nous avons été de tous ces combats et il en reste tant d’autres à mener pour Mumia Abu-Jamal, Marwan Barghouti, le Mandela palestinien.

Dans l’attente de votre réponse, veuillez recevoir Madame la Maire l’expression de nos salutations distinguées.

Rédigé par caroleone

Publié dans #prisonniers politiques, #Mumia

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article