Brésil : Le peuple Suruhawa

Publié le 3 Avril 2014

image © Adriana Azevedo/Survival

Ou zuruahã

Peuple indigène isolé de l’état d’Amazonas au Brésil.

Ils sont appelés aussi les indiens de la Coxodoa (nom donné après les premiers contacts)

L’ethnonyme zuruhuã est issu d’un sous-groupe éteint, les zuruhuã des rives de la Cunuia. Certains refusent ce nom et se disent « jokihidawa », car ils vivent sur les terres du ruisseau Jokihi.

Terre indigène

  • T.I Zuruhã - 233.070 hectares, 171 personnes, réserve homologuée dans l'état d'Amazonas. Ville : Tapauá.

Les terres autochtones Zuruhuã ont été ratifiées en 1991, elles ont une superficie de 239.070 hectares.

Leur territoire est situé entre les bassins des rivières Purus et Jurua, deux grands affluents de la rive droite du Solimões supérieur.

Population : 171 (2014)

Ils sont les derniers survivants de plusieurs sous-groupes qui ont succombé aux maladies infectieuses et virales importées par les blancs ainsi qu’au boom du caoutchouc du XXe siècle.

Ses sous-groupes seraient :
  • Les jokihidawa (ruisseau Pretão)
  • Les tabosorodawa (ruisseau Watanaha)
  • Les adamidawa (ruisseau Pretinho)
  • Les nakydanidawa (ruisseau Indio)
  • Les sarakoadawa (rivière Coxodoa)
  • Les yjanamymady (cours supérieur du São Luiz)
  • Les zuruhuã (rivière Cunuia)
  • Les korobidawa (affluent de la Cunuia)
  • Les masanidawa (ruiseau Arigo)
  • Les zamadawa (rivière Rozinho supérieure)

image © Adriana Huber/Survival

Brefs repères historiques :
  • La funai a connaissance du groupe depuis les années 1970.
  • 1978 : contacts avec les membres du CIMI (conseil indigéniste missionnaire)
  • Décembre 1983 : contacts avec une expédition de l’agence baptisée opération Coxodoa composée de 12 personnes dont des indiens waiwai et waimiri atroari.
  • 1984 : contacts avec des membres de la mission de Jocum
  • 1985 : une parcelle de 233.900 hectares est délimitée et proposée à la municipalité de Camarva pour éviter l’invasion des non indiens.
Mode de vie

Ils vivent dans une grande maison collective conique construite dans le centre du territoire. La maison (APD) n’a pas de parois latérales ni de cloisons intérieures et chaque famille l’occupe au hasard en respectant seulement la parenté consanguine de l’un des conjoints.

La maison est la propriété de l’homme qui l’a construite il en est l’anidawa.

Dans sa vie un homme peut construire 4 ou 5 maisons, il faut un an ou deux d’efforts pour se faire avec la collaboration de tous les hommes pour assembler la structure de bois et la couverture de chaume.

Il ne semble pas exister de leadership politique mais plutôt un ordre des chasseurs de nature hiérarchique classant les hommes en fonction du nombre de tapirs que chacun a tué.

La naissance des garçons est source de fierté et les femmes redoutent plus que tout de ne pas en faire naître.

Il existe 6 phases principales de groupes d’âge déterminant la vie des suruhawa.

La chasse

En dehors des expéditions de chasse journalière, les chasseurs organisent deux formes d’expéditions spéciales, le kazabo qui est un camp incluant les familles nucléaires et qui dure pendant une semaine et la zawada pour laquelle les hommes seuls partent dans des zones reculées pour une semaine ou plus. Les armes de chasses utilisées sont les arcs et les sarbacanes avec des flèches et fléchettes empoisonnées au curare. La proie favorite est le tapir qui est un trophée de choix et donne droit à un rang particulier au chasseur selon le nombre de tapirs qu’il a tué. Le tapir est cuisiné de plusieurs façons et il est servi distribué dans la famille.

La pêche

Ils utilisent des crochets ou des fils de nylon et utilisent pour la pêche à la nivrée collective deux poisons végétaux : une variété de timbo, konaha du genre lonchocarpus et une variété de tingui, bakyna.

La culture

Ils cultivent dans des parcelles avec le système d’essartage (abattis brûlis) plusieurs espèces de manioc amer et doux, des bananes, de la canne à sucre et des racines.

La cueillette de fruits sauvages complète l’alimentation diversifiée.

Rites de passages
Le rite de passage des garçons

Le rite de passage des garçons (12 à 14 ans) est un évènement public basé sur les relations d’affinité. Après une chasse ou une pêche se déroule un repas collectif et des danses, les garçons reçoivent un ornement de cordes de coton et doivent combattre les hommes adultes (en dehors de leurs parents consanguins).

Puis ils vont se coucher dans des hamacs suspendus très haut dans la partie centrale de la maison pendant que les parents consanguins prennent part à des combats (gaha). Ensuite les femmes emmènent les garçons se baigner dans la rivière, leur coupent les cheveux et les peignent au roucou.

Le rite de passage des filles

Elles entrent dans l’adolescence après leurs premières règles ce qui donne lieu comme de nombreuses ethnies à une période de réclusion et d’isolement au cœur de l’espace domestique (la jeune fille a les yeux bandés et elle reste couchée dans son hamac en mangeant très peu, elle n’a le droit de sortir que la nuit pour ses besoins naturels).

Les femmes subissent une soumission forcée et leur comportement sexuel est en surveillance constante. Elles ne peuvent pas sortir seules en raison de la menace de « violence sexuelle » des non consanguins.

Cycle de vie

(noms des groupes de garçons et entre parenthèses de filles)

  • 2 à 7 ans : hawini (hazamoni)
  • 8 à 13 ans : kahany (zamosini)
  • 14 à 28 ans : wasi (atona)
  • 29 à 38 ans : dogoasy (wasi dogoasy)
  • 39 à 52 ans : dogoasy (dogoasy)
  • 53 ans et plus (cheveux blancs : hosa (hosa)
Les suicides

C’est l’un des aspects les plus dramatiques et les plus prononcés de la société zuruhua. Entre 1980 et 1995 on compte 38 décès par suicide par l’ingestion de konaha (timbo, plante contenant de la roténone utilisée lors des pêches à la nivrée). Une enquête sur 5 ou 6 générations dénombrent 122 cas (75 hommes et 47 femmes) signalés avant 1980. La plupart des suicidés impliquent des adolescents des deux sexes (personnes dans le wasi et l’atona groupe d’âge entre 14 et 28 ans).

Dans cette société il existe un dédain certain pour la vieillesse et le déclin physique.

Pour eux, il n’est pas bon de mourir vieux et il est bon de mourir jeune et fort. Les motifs des suicides sont souvent dus à des bouleversements individuels avec une autre personne ou le groupe et englobent une toile de sentiments tels l’affection (kahy), la colère (zawari), la nostalgie (kamonini) et la honte (kahkomy).

La mort tragique d’un suicide provoque souvent de nombreuses autres tentatives dans une réaction en chaîne qui affecte les parents et amis de la victime. Mais il faut savoir que toutes les morts y compris accidentelles provoquent ce genre de chose. Le comportement suicidaire chez les zuruhuã ne constitue donc pas un trouble ou un dysfonctionnement ni une forme de comportement déviant.il implique des principes structurels spécifiques qui singularisent le corps social, l’opposition entre la vie et la mort, l’asymétrie entre consanguins et alliés et le statut social.

Les menaces toujours

La compagnie pétrolière d’Etat Petrobras a commencé l’exploration pétrolière et gazière dans l’une des régions les plus isolées d’Amazonie, mettant en danger plusieurs tribus indiennes isolées.

Des sources locales rapportent que Petrobras a installé 15 barges avec des générateurs de grande capacité, des pipelines et des engins miniers sur la rivière Tapauá dans l’Etat d’Amazonas. L’exploration s’effectue à proximité de sept territoires indigènes, dont ceux des Suruwaha, des Banawa, des Deni et des Paumari.

Les Suruwaha dont le territoire est situé à proximité du site d’exploration sont sous le joug des missionnaires fondamentalistes depuis des années. Ces missionnaires prétendent à tort qu’ils tuent régulièrement les nouveaux-nés. En 2012, ils ont été la cible d’un reportage de la chaîne australienne Channel 7 qui parlait d’un ‘culte du suicide’ de ’l’âge de pierre’ à propos des Suruwaha, les considérant comme les ‘pires violateurs des droits de l’homme dans le monde’. Survival a porté plainte auprès de l’ACMA, l’autorité de régulation des médias en Australie, qui a statué que la chaîne s’était rendue coupable d’avoir enfreint la clause de racisme inscrite dans son règlement intérieur.

Sources : socioambiantal, survival

Rédigé par caroleone

Publié dans #Brésil, #ABYA YALA, #Peuples originaires, #Suruhawa

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