Dois-je renier mon occitanisme pour être un progessiste pur jus?
Publié le 9 Février 2014
Cet article est reposté depuis Le blog de Roger Colombier.
En ce moment, à écouter ou à lire certains, je pourrai m'interroger, moi avec mon accent de Narbonne qui revendique mum pais, quand mon existence se tricote désormais beaucoup plus en Île-de-France que dans mon pays d'oc natal.
Mon grand-père Catalan espagnol a combattu dans le camp républicain durant la guerre d'Espagne. Rendu en France, lorsque celle-ci était en pleine débâcle militaire, il essaya pourtant de s'engager pour défendre cette république qui l'avait trahi. Plus tard ouvrier viticole dans le Narbonnais et syndiqué à la CGT, il resta attaché à sa langue maternelle et à la lutte, le catalan étant l'idiome naturel des prolétaires de cette terre à vignes. A-t-il pour autant renié ses idées de progrès, de justice sociale et de solidarité?
En 1871, l'éphémère Commune de Narbonne se déclama-telle dans la langue d'oïl de Paris? En 1907, lors de la révolte des vignerons, les soldats méridionaux du 17e, tournant leurs crosses pour ne pas fusiller leurs frères, avaient-ils lu Zola ou Hugo en français dans le texte.
Et je me souviens de mon père, représentant CGT de son usine en grève en mai-juin 68, distribuer la solidarité aux familles de grévistes au sein du comité de grève local, qui parlait en occitan dans la chaleur de l'instant.
Dans ce Midi que je connais et j'aime, des hommes et des femmes, des gens simples mais des gens biens, dans l'idiome de leur pays natal, ont défendu les valeurs de la patrie des droits de l'Homme, une et indivisible, sans pour cela gommer leur originalité.
Pourquoi vouloir alors que je mette ma langue d'oc dans ma poche et que je fasse table rase de mes origines languedociennes autant que catalanes? Pourquoi me l'ordonner et en fonction de quel dogme?
A moins de faire siens, les propos du barde réactionnaire Alain Finkielkraut, lors d'un petit déjeuner de l'UMP, ce 24 janvier:"Je suis très frappé que maintenant, nombre de beurs et mêmes de gens qui vivent dans les banlieues, quelle que soie leur origine ethnique, ont un accent qui n’est plus français tout à fait. Mais ils sont nés en France ! Et pourquoi ont-ils un accent ? Et pourquoi leurs enfants auraient-ils un accent ? C’est tout à fait sidérant."Et d’expliquer qu’on ne doit pas avoir d’accent "puisqu’on est né en France". Sinon, c'est "une sécession culturelle".
Certes, il faut en ce moment combattre plus rudement pour défendre les droits conquis par la lutte des travailleurs. Mais lorsque les citoyens de Marseille et de Montpellier, marchant vers Paris en 1792, entonnant le Chant des volontaires pour l'Armée du Rhin (devenu par eux la Marseillaise) pour défendre la patrie en danger, beaucoup d'entre eux parlaient-ils la langue de Robespierre? Non, il avait simplement la Révolution dans leur coeur et c'est cela qui était important.
Aujourd'hui, sans se défausser dans les luttes présentes, je reste fidèle à mon héritage culturel qui est le même que celui de mon présent: la justice, la démocratie et le progrès social. En langue d'oc comme en français, ou en d'autres idiomes.
Enfin, faire référence à la Constitution actuelle pour rétrécir l'usage des langues régionales française à une peau de chagrin, me laisse perplexe. Les mêmes, avançant cet argument, sont ceux qui veulent abolir (à juste raison) cette constitution monarchique scellant la 5e République.
Allez, un petit coup du 17e de ligne:
chansons historiques de France 77 : Gloire au 17eme ! 1907
En 1907, les vignerons du midi de la France s'étaient révoltés contre le vin chimique, qui leur faisait concurrence. A leur tête était Marcelin Albert. Quand ils manifestèrent à Béziers, on...